La huitième plaie d’Égypte
Le président Moubarak qualifie la pression démographique de « mère de tous les maux ». Mais il aura bien du mal à faire entendre raison à ses concitoyens.
Capitale culturelle du monde arabe, Le Caire est aussi une vertigineuse mégapole de quelque 20 millions d’habitants. Les images de paysans fuyant la misère des campagnes pour trouver refuge dans les cimetières, aux abords des voies ferrées ou sur les toits des immeubles ont fait le tour du monde. Avec une population totale de 80 millions d’habitants pour une superficie d’environ 1 million de km2, l’Égypte présente une densité (80 habitants au km2) qui peut paraître acceptable (la moyenne mondiale est de 50 hab/km2). Sauf que 90 % de cette population est concentrée dans le delta et la vallée du Nil, soit un territoire de 40 000 km2, l’équivalent, en Afrique, de la Guinée-Bissau (1,8 million d’habitants) ou, en Europe, de la Suisse (7,5 millions d’habitants). Qui plus est, près de 40 millions d’Égyptiens sont désormais des citadins.
Le président Hosni Moubarak s’est à plusieurs reprises ému de la pression démographique dans son pays. Pour lui, c’est la « mère de tous les maux ». À plusieurs reprises, il a reproché à ses compatriotes de « faire concurrence aux lapins ». Il en a remis une couche le 9 juin, à l’occasion de l’ouverture du deuxième Congrès national sur la population (le premier a eu lieu il y a vingt ans). Au rythme actuel, a-t-il déclaré, le pays des Pharaons atteindra 160 millions d’habitants en 2050. Si les prévisions du raïs peuvent paraître alarmistes, le cap des 100 millions sera assurément atteint autour de 2025.
La politique de planification familiale remonte à 1964, mais elle a butté sur la pauvreté et l’analphabétisme, et ses effets ont été longs à se faire sentir. La natalité, certes, a connu une baisse sensible, mais l’indice de fécondité (3,1 enfants par femme) demeure élevé par comparaison avec le Maghreb (2 en Tunisie, 2,3 en Algérie et au Maroc). La mortalité ayant elle aussi diminué (6 décès pour 1 000 habitants), le taux de croissance naturelle (18,5 pour 1 000) reste soutenu. Hosni Moubarak pourra toujours s’époumoner. Sur les bords du Nil comme ailleurs, l’éducation, la santé, le travail des femmes sont, de loin, les meilleurs contraceptifs.
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