Dette souveraine : la bulle se dégonfle

Les obligations des pays en développement trouvent toujours preneurs. Mais les investisseurs sont plus méfiants. Résultat : pour certains États, les taux d’intérêt remontent.

Ces dernières années, plusieurs pays en développement ont profité d’un environnement favorable pour lancer leurs premiers emprunts obligataires. © Glez pour J.A.

Ces dernières années, plusieurs pays en développement ont profité d’un environnement favorable pour lancer leurs premiers emprunts obligataires. © Glez pour J.A.

Julien_Clemencot

Publié le 19 mai 2014 Lecture : 3 minutes.

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Ces dernières années, de nombreux pays en développement ont profité d’un environnement favorable (forte demande et taux d’intérêt au plus bas) pour lancer leurs premiers emprunts obligataires sur le marché international. Aujourd’hui, les investisseurs se montrent plus exigeants et demandent dans certains cas des intérêts plus élevés pour compenser le risque. « Les États ont profité de crédits faciles, mais les choses sont en train de devenir un peu plus compliquées », estime Shilan Shah, économiste au sein de Capital Economics.

Analyse détaillée

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Dorénavant, les investisseurs regardent dans le détail les perspectives économiques de chaque pays émetteur. Situations sociales tendues, instabilité politique et réputation de mauvais payeur entrent en compte. La dépendance aux achats de matières premières de la Chine constitue aussi un critère important pour déterminer le niveau des intérêts. Ces derniers mois, la deuxième puissance économique mondiale s’est davantage préoccupée de son marché intérieur, ralentissant sa consommation de minerai.

Des pays comme la Zambie, dont l’économie repose sur la production de métaux, se trouvent par conséquent plus exposés au risque. Lusaka a vu son taux grimper de 5,63 % en 2012 à 8,63 % au début du mois d’avril.

JA2783p140 info« Deux phénomènes se télescopent sur les marchés émergents : il y a l’envie des investisseurs de diversifier leur portefeuille d’obligations, mais aussi une plus grande attention portée aux fondamentaux économiques des pays », analyse Charles Robertson, chef économiste au sein de la banque Renaissance Capital à Londres.

« C’est toujours intéressant pour les États de venir sur le marché, mais on fait une distinction entre les économies attractives et celles allant au-devant de problèmes », explique Nicolas Jaquier, économiste chargé des marchés émergents au sein de Standard Life Investments.

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Le Ghana, qui il y a quelques années était montré en exemple pour sa classe moyenne et ses importantes réserves de pétrole, a vu le coût de ses emprunts augmenter. Les investisseurs qui comblaient ses déficits sans sourciller demandent aujourd’hui de meilleurs rendements. L’émission de 1 milliard de dollars (723 millions d’euros) réalisée l’an dernier avec un taux de 7,88 % se négocie aujourd’hui au-dessus de 9 %.

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Succès important

À l’inverse, quand le Pakistan a proposé une obligation en dollars au mois d’avril, après sept ans d’absence sur le marché international, les investisseurs se sont montrés très intéressés. Le pays recherchait 2 milliards de dollars. La vente a été sur-souscrite à 7 milliards de dollars, notamment par des donneurs d’ordre américains.

« L’intérêt des investisseurs n’est pas coupé de la réalité du terrain », explique Stuart Culverhouse, économiste chez Exotix, une société spécialisée dans les marchés émergents.

Cependant, le Pakistan, qui continue de recevoir l’aide du FMI, voit son taux d’intérêt augmenter depuis sa dernière émission. De 6,88 % en 2007, il est passé à 8,25 % en avril.

Regain

Pour d’autres, le prix de l’argent continue de baisser. C’est le cas du Nigeria, dont le taux d’intérêt est passé de 7 % à 6,63 % entre janvier 2011 et juillet 2013. Le Sri Lanka, dont l’économie a crû de 7 % en 2013, a quant à lui pu emprunter 500 millions de dollars au taux plancher record de 5,13 %.

Les banquiers estiment également que la première obligation kényane sur le marché international, attendue prochainement, devrait rencontrer un succès important. « Les investisseurs aiment entendre de nouvelles histoires », conclut Samad Sirohey, directrice du marché obligataire au sein de Citigroup.

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