Afrique numérique : Abasi Ene-Obong (54gene) veut devenir le nouveau porte-drapeau de la génétique africaine 

Après avoir levé 15 millions de dollars l’an dernier et participé à des campagnes de dépistage du coronavirus, le fondateur de la start-up nigériane de biotechnologie veut sortir des frontières de son pays.

Abasi Ene-Obong. © 54gene

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Publié le 10 avril 2021 Lecture : 3 minutes.

Afrique Digitale © Jon Berkeley pour JA
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Expansion. Ce mot revient sans cesse dans la bouche d’Abasi Ene-Obong lorsqu’il évoque sa start-up biomédicale 54gene. Sans entrer dans le détail, l’entrepreneur considère qu’il est « temps de passer à une échelle supérieure » en sortant des frontières du Nigeria.

Pourtant, depuis l’arrivée de la pandémie de Covid-19, exactement un an après la création de sa société, la situation de son pays et les sollicitations des autorités ne lui ont pas vraiment laissé le temps de s’y préparer.

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Après une première année prometteuse où elle avait levé 4,5 millions de dollars après trois mois d’incubation dans le prestigieux accélérateur américain Y Combinator, sa start-up avait entamé 2020 sur les chapeaux de roue.

En l’espace de deux mois, elle était en mesure de délivrer 1 000 tests par jour

En février, elle créait l’African Center for Translational Genomics (ACTG), une banque de données génétiques gérée par le Non-Communicable Diseases – Genetic Heritage Study (NCD-GHS), un consortium réunissant plusieurs administrations nigérianes de santé publique comme la National Biotechnology Development Agency (NABDA) et le Nigerian Institute Of Medical Research (NIMR).

Bousculé par la pandémie

À la mi-avril 2020, 54gene a cette fois réuni 15 millions de dollars auprès d’une dizaine d’investisseurs, dont la Fondation Bill-et-Melinda Gates et trois fonds africains. Mais la pandémie a bousculé les plans du fondateur. Fin avril, la start-up  s’est engagée au côté du Nigeria Centre for Disease Control (NCDC) pour mener des campagnes de dépistage dans tout le pays.

Dès le mois de mai, elle était en mesure de délivrer 1 000 tests par jour, « grâce à nos laboratoires mobiles d’analyse PCR, parmi les premiers de ce type au monde », précise Abasi Ene-Obong.

Ce sont plus de 1,3 milliard de personnes qui sont exclues des bases de données de santé

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54gene n’a cependant pas perdu de vue sa mission principale : séquencer les génomes africains pour adapter les solutions médicales aux populations du continent. Après avoir étudié l’ADN de 100 000 Nigérians avec l’African Center of Excellence for Genomics of Infectious Diseases (ACEGID), la start-up a inauguré en janvier son propre laboratoire de séquençage. Avec celui de l’ACEGID, il est aujourd’hui le seul à posséder du matériel de pointe dont la valeur dépasse un million d’euros.

À l’origine, la création de 54gene répond à la volonté de remédier à l’absence des profils africains dans de nombreuses études médicales. S’ils représentent plus de 17 % de la population mondiale, seuls 3 % des études génomiques leur sont consacrées. A contrario, 78 % de ces dernières portent sur des profils génétiques européens (en anglais, caucasian) quand ceux-ci pèsent seulement 16 % de la population totale.

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Le déséquilibre est encore plus flagrant pour les données utilisées pour les recherches pharmaceutiques : 90 % proviennent de personnes d’origine européenne, et 2 % de celles d’origine africaine. « Ce sont plus de 1,3 milliard de personnes qui sont exclues des bases de données de santé, regrette le fondateur. Or, grâce à mon parcours, j’ai appris que les données étaient la clé pour donner accès aux dernières avancées technologiques en matière de santé. »

Lien entre  informatique et biotechnologies

Né à Calabar, dans le sud-est du Nigeria, en 1986, Abasi Ene-Obong a découvert les ordinateurs « à l’âge de 6-7 ans ». Mais c’est à 22 ans, alors qu’il a quitté son pays, un bachelor de génétique et biotechnologie dans ses valises, pour décrocher un master en génétique moléculaire à l’Imperial College de Londres, qu’il fait le lien entre l’informatique et les biotechnologies. Il enchaîne avec un doctorat en biologie du cancer à Londres, puis un master de management aux Claremont Colleges, en Californie, avant de démarrer une carrière de consultant aux États-Unis.

Je veux être un catalyseur pour le secteur universitaire clinique

Successivement, il travaille alors pour le laboratoire Gilead, rejoint ensuite IMS Health, « l’une des plus grosses firmes gérant des données de santé à l’époque », puis PwC. En 2016, il revient finalement au Nigeria pour fonder sa start-up.

Désormais, Abasi Ene-Obong considère le continent tout entier comme son marché. Et se voit comme « un catalyseur technologique pour le secteur universitaire clinique en Afrique, où 54gene noue des partenariats avec des praticiens ou des chercheurs pour réaliser des études qui n’ont jamais été faites auparavant ». Des études dont les résultats devraient être annoncés, « dans les prochains mois », promet le PDG.

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