Maroc : le Mouton noir d’Aniss Meski, une cantine entre junk food bien faite et cuisine du marché

« Marrakech, capitale de la gastronomie » (4/6). Dans cette petite adresse très recherchée, la « comfort food » aux accents québécois prend des allures haut de gamme. Une approche inventive signée d’un chef atypique passé par la France et Montréal.

Aniss Meski, un chef aux influences cosmopolites. © Naoufal Sbaoui pour JA

Publié le 24 février 2022 Lecture : 3 minutes.

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Marrakech, capitale de la gastronomie : à la rencontre des grands chefs marocains

Issam Rhachi, Nargisse Benkabbou, Aniss Meski, Erwann Lance, Khouloud Belkahia, Faiçal Zahraoui. À Marrakech, la simple mention de leur nom donne l’eau à la bouche des gastronomes. Rencontre avec la nouvelle génération des grands chefs de la Ville rouge.

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Au premier coup d’œil, on pourrait croire que le lieu porte mal son nom : au Mouton noir, tout est quasiment blanc. Cette petite cantine a ouvert ses portes dans le quartier de Guéliz, à Marrakech, en septembre 2021. Elle offre une vue plongeante sur la cuisine et les plats en cours de préparation. Aniss Meski s’arrête entre deux recettes pour raconter ce projet qu’il porte avec sa femme, Stacy O’Neill.

Un paysage gastronomique en pleine mutation

Sa définition du Mouton Noir ? Un endroit où découvrir « la gastronomie montréalaise ». Face à notre étonnement, il précise qu’il y a « autre chose que la poutine, les burgers et les fast-foods à Montréal. » Après avoir grandi à Casa et étudié en France, il a vécu dix ans là-bas. Et y a découvert une énergie restauratrice envoûtante, avant de vouloir s’installer à Marrakech.

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« Je suis pas mal de chefs marocains sur Instagram, je voyais que ça bougeait et je me suis dit que c’était le moment ou jamais », se souvient-il. Sur place, il découvre un paysage gastronomique en pleine mutation, passant d’une tendance « hyper française, hyper classique » à quelque chose de bien plus dynamique et diversifié, où la jeune génération de créateurs culinaires s’épanouit depuis peu.

Lorsque survient la pandémie de Covid, il décide de préparer ses plats et de les mettre sous vide pour les livrer à domicile

Un mouvement dans lequel il vient s’inscrire, avec sa cuisine inventive à proposer chez des gens pour des soirées, des événements ou des dîners privés. Mais c’était sans compter sur la pandémie de Covid-19, qui met un coup de frein brutal au projet. L’idée lui vient alors de préparer ses plats et de les mettre sous vide pour les livrer à domicile : le restaurant à la maison, version sans contact, en somme.

Malgré une période floue lui offrant peu de visibilité sur l’avenir, il met sa carte à jour toutes les semaines depuis Instagram, qu’il considère un peu comme « le nouveau guide pour les locaux comme pour les touristes en matière de restauration ». « Hachis parmentier à la truffe avec bœuf effiloché, saumon fumé maison, voilà le genre de choses que l’on proposait. On a tenu un an et demi comme ça, avant de se décider à trouver un local, qui devait être juste une épicerie et qui a fini par être ce restaurant », raconte-t-il.

Twister les classiques

La manière dont il perçoit son menu ? Un mélange de cuisine du marché et « de junk food bien faite ». Selon lui, des plats « simples », qui ont – selon nous – des looks haut de gamme. On y trouve un burger de crevettes, un grilled cheese avec oignons caramélisés, pommes et champignons poêlés. Mais aussi la version maison du « steak-frites », soit une bavette marinée pendant une semaine – rien que cela – dans du vin rouge, de l’ail, du thym, du romarin et de la moutarde. De la comfort food, rapide à manger, mais pas tant à préparer, qui a pour but de plaire à tout le monde. Quant à son sandwich focaccia à la stracciatella, c’est une véritable œuvre d’art. On n’est pas sûr d’oser croquer dedans, de peur de l’abîmer.

Chaque jour, il s’amuse avec ce qu’il appelle ses « spéciaux », des plats qui évoluent au fil de ce qu’il trouve au marché

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« J’aime bien m’attarder sur les assiettes », sourit Aniss. En marge du menu classique, il s’amuse avec ce qu’il appelle ses « spéciaux », des plats – de 125 à 145 dirhams, soit environ 11,50 à 12,50 euros – qui évoluent au fil de ce qu’il trouve au marché.

Ce jour-là, par exemple, la recette est à base de topinambours. Si le légume peut paraître assez peu sexy, la version Aniss Meski donne envie d’y goûter. Il détaille : « je l’ai préparé en purée avec du café, ce qui donne un petit côté cappuccino. Je l’ai aussi assaisonné avec du jaune d’œuf cuit dans du sel et du sucre pendant 4 jours. Une fois bien sec, je l’ai passé au four à très basse température, puis gratté, et ça a fait une poudre qui agrémente le tout. »

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Pour ses débuts, Aniss voulait reprendre des classiques. Partir d’une base connue en twistant la recette, comme avec ses poireaux vinaigrette au saumon fumé et œuf mollet, où le poireau est snacké, parsemé d’une poudre de poireaux brûlés et recouvert d’une vinaigrette à l’estragon. Ou avec son tartare de saumon, agrémenté d’une crème de dashi, de nouri et de chips au wasabi. Bref, assez discuté : et si on passait à table ?

Retrouvez tous les épisodes de notre série « Marrakech, capitale de la gastronomie »

Épisode 1 : Au Douar, Issam Rhachi réinvente la cuisine des campagnes
Épisode 2 : Avec L’mida, Nargisse Benkabbou convertit la médina à la cuisine fusion
Épisode 3 : Au Petit Cornichon, Erwann Lance conjugue bistronomie et bonne franquette

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