Gilbert Houngbo : « La politisation du débat sur les migrants empêche de réfléchir à de nouvelles solutions »

Immigration, droit du travail au Qatar, égalité des genres… L’ancien Premier ministre togolais, qui prend ses fonctions à la tête de l’Organisation internationale du travail le 3 octobre, répond aux questions de JA et réagit à la décision du président béninois Patrice Talon de restreindre le droit de grève.

Gilbert Houngbo, le 1er septembre 2022, à Genève. © Damien Riunaud/OIT

Julien_Clemencot

Publié le 2 septembre 2022 Lecture : 7 minutes.

Le 3 octobre prochain, l’ancien Premier ministre togolais Gilbert Houngbo deviendra le premier directeur général africain de l’Organisation internationale du travail (OIT), la plus ancienne agence des Nations unies. Alors qu’il dirige pour quelques semaines encore le Fonds international pour le développement agricole (Fida), nous l’avons rencontré le 1er septembre au siège de l’OIT à Genève. Jeune Afrique publie en avant-première les meilleurs extraits de l’interview qui sera diffusée le 3 septembre, sur RFI, dans le cadre du Grand invité de l’économie Jeune Afrique-RFI.

Jeune Afrique : En août, l’OIT a annoncé une baisse du chômage dans le monde en 2022. Quelle est la situation du marché de l’emploi sur le continent ?

Gilbert Houngbo : Chaque année, entre 12 et 15 millions de jeunes arrivent sur ce marché. Il y a un problème d’adéquation entre l’offre et la demande. Les gouvernements savent qu’ils doivent faire davantage pour encourager l’initiative privée, développer des compétences et orienter les jeunes vers les secteurs porteurs.

Les spécialistes de l’éducation pointent ces problèmes d’inadéquation entre offre et demande depuis des décennies : pourquoi est-ce si difficile pour les gouvernements d’investir sur l’éducation ?

Les gouvernements commencent à faire des efforts. C’est une question de répartition des investissements publics et d’espace budgétaire. Ce sont des questions complexes. Certains pays envoient des jeunes se former à l’extérieur, mais le taux de retour est faible, parfois inférieur à 20 %, alors que cela consomme une bonne partie du budget. Les efforts de formation doivent aussi davantage viser les femmes.

L’égalité des genres, une thématique devenue très forte en Occident depuis une dizaine d’années, a-t-elle la même acuité en Afrique ?

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Je pense que oui. On voit de plus en plus de jeunes filles très bien formées. Mais je reconnais que toutes les barrières sont loin d’être tombées.

Est-ce qu’on peut dire qu’une partie du retard économique du continent serait effacé si les femmes participaient davantage à la création de richesse ?

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C’est clair. Il y a quelques années, une étude de la Banque mondiale l’a très bien montré. Si  je prends le secteur agricole, les femmes n’ont pas accès aux mêmes niveaux de ressources productives (la terre, les intrants, le financement) parce que la préférence est donnée aux hommes. Je l’ai constaté lorsque j’étais Premier ministre. Que ce soit au Nord comme au Sud, nous sommes loin d’avoir gagné la bataille de l’égalité. En Afrique, le Rwanda est sans doute le pays qui a le plus fait dans ce domaine.

Bien s’informer, mieux décider

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