Un ancien ministre de Tebboune devant les juges

Nassim Diafat, symbole du renouvellement des générations lors de sa nomination en 2020, est le premier ministre de la nouvelle ère à se retrouver sur le banc des accusés.

Nassim Diafat à Alger, le 3 mars 2021. © Dzireo/APP/NurPhoto via AFP

Publié le 13 avril 2023 Lecture : 3 minutes.

C’est dans la nuit du 6 au 7 avril que l’ancien ministre délégué chargé des micro-entreprises, Nassim Diafat, a été placé sous mandat de dépôt à la prison de Koléa pour abus de pouvoir et dilapidation de deniers publics. Il est précisément accusé d’avoir usé de son influence à sept reprises pour faire bénéficier les membres de sa famille de marchés avec l’Algérienne de réalisation d’infrastructure et équipements (Alrim), l’une des filiales du groupe de sidérurgie public Imetal dont le siège social se trouve dans la zone industrielle de Oued Semmar.

Le juge d’instruction de la huitième chambre du pôle économique et financier du tribunal algérois Sidi M’Hamed va maintenant l’entendre sur le fond de l’affaire et le confronter aux déclarations de ses co-accusés et ce, dès la réception d’un complément d’enquête fourni par le service central de la lutte contre le crime financier et économique relevant de la direction générale de la Sûreté nationale.

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Factures démesurées

Le dossier comprend aussi des factures de mobilier et d’équipement de bureau pour le ministère jugées démesurées. Les auditions, qui ont duré seize heures, ont abouti aussi au placement en détention provisoire du directeur général de l’Alrim, ainsi que de quatre cadres de la même entreprise. L’épouse et les frères de l’ex-ministre délégué ont été placés sous contrôle judiciaire avec retrait de leurs passeports.

Toujours selon nos sources, ces poursuites ont été engagées dans le sillage de l’enquête préliminaire sur la gestion du groupe public Imetal, du complexe sidérurgique d’El Hadjar géré par Sider, et de l’entreprise nationale de récupération (ENR). Une enquête ouverte au début de l’année et qui s’est soldée, en mars, par l’interpellation d’une vingtaine de personnes pour abus de fonction, passations de marchés en violation de la réglementation et octroi de privilèges indus. Le PDG d’Imetal et celui de Sider ont été incarcérés.

« Caution jeune »

Nassim Diafat, 39 ans était constamment tendu depuis son éviction du gouvernement le 8 septembre 2022, témoignent ses anciens collaborateurs. Depuis la vague d’arrestations qui a touché les principaux cadres du secteur de sidérurgie, il se savait en sursis. Ex-dirigeant de la société de nouvelles technologies Numedia Telecom et membre de la Fédération nationale des jeunes entrepreneurs, Nassim Diafat incarnait – aux côtés de Yacine Oualid et Sid Ali Khaldi, respectivement en charge des start-up et de la jeunesse et des sports – une « caution jeune »  au sein de l’exécutif.

Désormais, il est aussi le premier ministre de l’ère Tebboune à faire l’objet de poursuites judiciaires, si l’on exempte Areski Baraki, ministre des Ressources en eau (janvier 2020 et février 2021), qui a été mis en détention en juin 2021, mais pour des faits de dilapidation des deniers publics remontant à l’époque où il dirigeait l’Agence nationale des barrages et transferts.

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« Gangrène »

Quelques heures après l’arrestation de Nassim Diafat, des rumeurs ont circulé sur des poursuites engagées contre au moins trois autres ministres du gouvernement d’Aymen Benabderrahmane. L’agence Algérie Presse Service, qui répercute habituellement les messages de la Présidence, a soutenu le 11 avril qu’il s’agissait de « fake-news propagées sur la toile dans l’objectif de montrer à l’opinion nationale et internationale qu’il y aurait quelque chose de pourri dans la nouvelle Algérie, et de déstabiliser les cadres en créant un climat de peur et de suspicion ».

« L’épisode Diafat, poursuit la dépêche, est la preuve de la fin de l’impunité. La gangrène est traitée immédiatement pour ne pas se généraliser comme par le passé. » Une formule qui fait clairement allusion aux vingt ans de gouvernance d’Abdelaziz Bouteflika, poussé à la démission le 2 avril 2019 sous la pression des marches populaires hebdomadaires et dont, depuis, de nombreux ministres ou hauts responsables ont été rattrapés par la justice. De nombreux internautes ont immédiatement commenté le texte de l’agence de presse officielle l’assimilant à une atteinte à la présomption d’innocence, soulignant que l’instruction est à peine entamée.

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