Yoweri Museveni ne serait en fait qu’à moitié homophobe

Dans son discours sur l’état de la nation, le président ougandais est revenu sur la loi anti-LGBT+ qu’il a promulguée fin mai.

© Damien Glez

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Publié le 9 juin 2023 Lecture : 2 minutes.

Yoweri Museveni a de la suite dans les idées. Le 7 juin, à l’occasion de son discours sur l’état de la nation, le chef de l’État ougandais a enfoncé le clou de la loi considérée comme « anti-homosexualité », pour tout à la fois la soutenir et tenter de nuancer son caractère liberticide.

Lors de l’adoption de ce texte législatif dont une disposition fait de « l’homosexualité aggravée » un crime capital passible d’une condamnation à mort – sentence qui, certes, n’est plus appliquée –, les Nations unies avaient dénoncé un « texte discriminatoire, probablement le pire au monde en son genre ». Mais selon le président ougandais, loin de lui l’intention de harceler les homosexuels… pour peu qu’ils « gardent leur nature » pour eux.

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Relations confidentielles

Il s’agirait donc de leur réserver simplement le même sort qu’aux hétérosexuels, dont les relations intimes sont en Ouganda « confidentielles ». Et le chef de l’État d’ajouter à son invitation à la discrétion l’hypothèse acceptable que l’homosexuel « cherche confidentiellement de l’aide auprès des médecins ou des prêtres », n’enfreignant ainsi pas la loi. Sauf que cette apparente mansuétude de Yoweri Museveni montre clairement que les orientations LGBT+ sont perçues comme des « déviances » dont il faudrait confier la guérison à une autorité médicale ou spirituelle.

En mars déjà, le chef de l’État avait considéré que le « fait d’être homosexuel » n’était pas un crime, mais que les relations homosexuelles l’étaient. Mais ce souci de la nuance cache mal la dureté de la loi. Cet appel à la « confidentialité » des ressentis et actes homosexuels fait écho à une disposition sur la « promotion » de l’homosexualité. Le texte stipule que quiconque –homosexuel ou non– « promeut sciemment l’homosexualité » encourt jusqu’à vingt ans de prison.

Affrontement civilisationnel

La promulgation de la loi a été condamnée par des ONG comme Amnesty International et par les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne (UE). Le président américain, Joe Biden, a ainsi dénoncé une loi « honteuse » et une « atteinte tragique » aux droits humains. Les eurodéputés, eux, ont déploré « la contribution du président Museveni à la rhétorique de haine envers les personnes LGBT+ ». De nombreux observateurs redoutent un regain de violence, de discriminations et de persécutions, ainsi qu’un recul de la lutte contre le sida.

Certains des promoteurs de la loi « anti-homosexualité » ougandaise n’hésitent pas à invoquer un affrontement civilisationnel avec un Occident « immoral », tandis que d’autres, cyniques, rappellent que le texte législatif s’inscrit dans la continuité d’une disposition légale datant de la colonisation britannique. Oublient-ils que la perception des mœurs est susceptible d’avoir évoluée depuis plus de six décennies ?

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