« Le sida est toujours un secret dans l’armée »

A 50 ans, Tatola Naringar fait partie des 5,3 pour cent de militaires tchadiens qui vivent avec le VIH, selon des données officielles de 2003. L’annonce de sa séropositivité en 2002 l’a amené à s’engager ouvertement à lutter contre la propagation du virus parmi les hommes et femmes en uniforme. Témoignage.

Publié le 29 avril 2009 Lecture : 2 minutes.

« Je suis entré dans l’armée en 1980. En 2002, ma femme a commencé à tomber malade. Elle a été hospitalisée à l’hôpital militaire d’instruction [HMI], et c’est là que les médecins m’ont annoncé qu’elle était séropositive et qu’il vaudrait mieux que je fasse un test aussi. Je l’ai fait, il était positif.

« C’était une grande surprise pour moi, mais je ne me suis pas découragé. Les militaires se déplacent beaucoup dans les régions, surtout dans des zones de combat et vers des pays [voisins] très touchés par l’épidémie comme la République centrafricaine [un des pays les plus infectés d’Afrique centrale] ou la République démocratique du Congo. Vous savez comment sont les hommes, j’ai peut-être trouvé le VIH quelque part en déplacement.

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« Au début, ma femme ne savait pas [son statut sérologique], les médecins ne lui avaient pas dit. Je n’ai pas voulu lui annoncer brusquement. Je l’ai préparée pendant deux ou trois mois avant de lui dire qu’elle avait la maladie et moi aussi, elle s’en doutait donc elle a accepté.

« Nous sommes allés tous les deux chez le médecin et nous avons été mis tout de suite sous ARV [antirétroviraux]. A l’époque, il n’y avait pas la gratuité [instaurée par le gouvernement en 2007], les ARV coûtaient 5 000 francs CFA [10 dollars] par mois, donc je les payais pour nous deux.

Un noyau anti-sida dans l’armée

« [Depuis 2004], il y a un noyau anti-sida dans l’armée [au HMI]. C’est là que je viens faire les examens et prendre les médicaments. Quand je pars en opération, je prends des réserves de médicaments. Même si c’est pour une mission à durée indéterminée, on me donne les médicaments sans problème.

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« Dans l’armée, mes chefs savent que je suis infecté, les hommes [de troupe] aussi, je ne le cache pas. Parfois le travail est dur, mais je n’ai pas été couché un seul jour depuis que je suis malade.

« Beaucoup de militaires ne veulent pas dire qu’ils sont infectés, surtout parmi les gradés. Ils ne se montrent pas. Le sida est toujours un secret dans l’armée, mais il faut qu’on se découvre, j’appelle souvent les autres [militaires séropositifs] à sortir. Les femmes [militaires séropositives] sont plus ouvertes, elles se déclarent plus facilement.

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« J’ai été formé comme pair éducateur, et nous avons créé [fin 2008] une association de militaires infectés, je suis secrétaire général et c’est une femme qui est présidente. Pour l’instant, nous ne sommes pas beaucoup parce que les gens viennent s’inscrire puis ils disparaissent, ils ne voient pas l’intérêt de rester ou de parler [du VIH].

« Il faut sortir pour aller sensibiliser les militaires sur le VIH, aussi pour éviter les rapports sexuels forcés. Il faut qu’on puisse aller parler aux militaires jusque dans les provinces ».

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