TER, ports, autoroutes… Macky Sall a-t-il tenu ses promesses ?

Pilier du plan Sénégal émergent, le déploiement des infrastructures a été au cœur des deux mandats du chef de l’État. Quel bilan peut-on en tirer à huit mois du passage de flambeau ?

Macky Sall lors de la cérémonie d’achèvement des travaux de la station TER à l’aéroport international Blaise-Diagne de Dakar, le 8 juillet 2023. © Fatma Esma Arslan / ANADOLU AGENCY / Anadolu Agency via AFP.

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Publié le 13 juillet 2023 Lecture : 3 minutes.

Pour le Fonds monétaire international (FMI) comme pour la Banque mondiale, les investissements dans les infrastructures sont indispensables afin de booster le développement économique en Afrique subsaharienne. Macky Sall, au pouvoir depuis 2012, a saisi l’enjeu et lancé de nombreux « chantiers prioritaires ». À en croire les données gouvernementales, 2 526 kilomètres de routes, 6 673 km de pistes et 189 km d’autoroutes ont été construits ou rénovés entre 2012 et 2021.

Avec le plan Sénégal émergent (PSE), le chef de l’État, qui a récemment annoncé sa décision de ne pas participer à la course à la présidentielle de 2024, a multiplié les projets : Train express régional (TER) de Dakar, Bus Rapid Transit (BRT), autoroute Dakar-Tivaouane-Saint-Louis, port de Ndayane, rénovation des aéroports. Pourtant, « le bilan est mitigé », glisse Alioune Sall, consultant et directeur de l’Institut des futurs africains (IFA).

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Des projets coûteux… et en retard

Alors que le programme de développement PSE est censé s’achever à l’horizon 2035, certains projets enchaînent les reports. Lancés en octobre 2019, les travaux du BRT devaient initialement durer trente mois, le projet accuse un important retard. « Avec la vandalisation de 19 stations lors des dernières manifestations, les délais de livraison vont théoriquement augmenter au dernier trimestre 2023 », a expliqué le ministre sénégalais des Transports, Mansour Faye.

Annoncée pour avril 2022, l’entrée en service du Bus Rapid Transit (BRT) est encore une promesse non tenue, comme les précédentes annonces liées à la mise en circulation du TER reliant Dakar à Diamniadio, lequel a fait l’objet de multiples reports de 2018 à 2019, puis du début de 2020 à 2021. Mais, « ce non-respect des délais » reste à relativiser, argue Alioune Sall, car « au-delà d’une éventuelle mauvaise conception des projets, plusieurs projets sont restés à l’arrêt en raison de la pandémie du coronavirus au Sénégal, comme partout ailleurs dans le monde ».

Pour le directeur de l’IFA, la lenteur des travaux ne doit pas faire oublier « les coûts exorbitants » et « l’utilité approximative » de certains chantiers. Projet phare du PSE, la première phase du TER de Dakar a coûté 780 milliards de F CFA (1,19 milliard d’euros), financés avec des fonds propres et des prêts étrangers. « Avec ces investissements, le Sénégal aurait pu relier la Casamance par le chemin de fer ou améliorer le réseau ferroviaire en direction de Bamako, mais les alternatives n’ont pas été assez exploitées », regrette Alioune Sall.

900 milliards de F CFA de gains annuels

À l’heure où la finalisation des travaux du deuxième tronçon du TER – qui reliera la capitale sénégalaise à l’aéroport international Blaise-Diagne – est annoncée pour décembre 2023, le Conseil exécutif des transports urbains de Dakar (Cetud) revient sur les avantages économiques que devraient conférer ces infrastructures.

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D’après une étude récente de l’organisme, la promotion de systèmes de mobilité verte (TER – BRT) permettra à l’économie sénégalaise de réduire de 900 milliards de F CFA le manque à gagner annuel lié aux dysfonctionnements induits par la congestion et l’insécurité routière au Sénégal. Le TER et le BRT visent en effet à désengorger la capitale Dakar, laquelle concentre sur 0,3 % du territoire la quasi-totalité des activités économiques du pays.

Des choix controversés

Bien qu’ambitieux dans leurs objectifs, ces projets – tout comme les chantiers du port de Ndayane et de l’autoroute Dakar-Tivaouane-Saint-Louis – ont fait l’objet de critiques. Touchés par une procédure d’expropriation foncière, quelques milliers de Sénégalais ont contesté « les dommages collatéraux ». En face, le gouvernement prône « l’utilité publique » et réaffirme son engagement à indemniser les personnes concernées.

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Et c’est loin d’être l’unique reproche. Le lancement des travaux de l’autoroute Dakar-Tivaouane-Saint-Louis, en février, a été accompagné par une gronde des acteurs du BTP sénégalais après la décision d’accorder le chantier à une entreprise ivoirienne, en l’occurrence le groupe PFO Africa.

« Le choix des prestataires de services n’a pas toujours été des plus heureux ni caractérisé par une grande transparence », déplore Alioune Sall. « La commande publique doit profiter aux entreprises sénégalaises et non essentiellement aux compagnies étrangères », souligne-t-il. Contactée, l’Agence pour la promotion des investissements et grands travaux Sénégal (Apix) n’avait pas répondu à nos sollicitations au moment de la publication de cet article.

À huit mois du passage de flambeau pour Macky Sall, plusieurs projets restent en cours de développement, notamment, la liaison Dakar-Tivaouane-Saint-Louis, le port de Ndayane ou encore la rénovation des aéroports régionaux. Si les critiques sont multiples, le camp présidentiel défend les choix du chef de l’État. « Les projets de mobilité urbaine et d’interconnexion routière sont indispensables pour le développement économique du Sénégal », insiste un officiel sénégalais joint par Jeune Afrique.

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