Abdelmadjid Tebboune à Pékin pour relancer le partenariat algéro-chinois

Longtemps omniprésentes en Algérie, les entreprises chinoises y sont moins actives. La visite d’État du président algérien à Pékin et Shenzhen vise en partie à redynamiser cette coopération économique.

Le président chinois Xi Jinping avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune lors d’une cérémonie de bienvenue au Grand Hall du Peuple à Pékin, le 18 juillet 2023. © Ng Han Guan / POOL / AFP

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Publié le 20 juillet 2023 Lecture : 4 minutes.

La visite d’État qu’Abdelmadjid Tebboune effectue en Chine du 17 au 21 juillet se distingue, déjà, par sa durée. Si son prédécesseur, Abdelaziz Bouteflika, s’y était déjà rendu à deux reprises en 2004 et 2006, il n’y a jamais séjourné plus de trois jours. Au-delà des dossiers politiques et diplomatiques évoqués à Pékin, le fait que le président algérien se rende aussi dans la grande métropole de Shenzhen confirme le statut de la Chine comme super partenaire économique et commercial.

L’importante délégation d’hommes d’affaires et de chefs d’entreprises du secteur public et privé qui accompagne Abdelmadjid Tebboune souligne le caractère exceptionnel de ce partenariat économique qui s’est consolidé, notamment, aux cours des deux dernières décennies.

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Eldorado algérien

Les chiffres disent combien les Chinois ont prospéré en Algérie sous la présidence Bouteflika, chassé du pouvoir par la révolution du printemps 2019. Sauf surprise, le montant des exportations chinoises vers l’Algérie pour l’année 2023 devrait s’établir à près de 8 milliards de dollars : la Chine est ainsi devenue le premier fournisseur de l’Algérie – avec 17 % de parts de marché – suivie de la France (10 %) et de l’Italie (7 %).

À titre de comparaison, on peut rappeler qu’en 2003, les exportations chinoises s’établissaient à environ 400 millions de dollars, selon les données établies par l’Office national des statistiques (ONS). On mesure donc la progression accomplie en 20 ans et, même si les autorités algériennes ambitionnent de réduire la facture d’importations (38,99 milliards de dollars au total en 2022), les parts de marchés de la Chine devraient se maintenir au niveau de ces cinq dernières années.

Entre 2003 et 2022, les exportations chinoises vers l’Algérie ont culminé à plus de 105 milliards de dollars. Voitures, jouets, téléphones, vêtements, équipements électroménagers, biens de consommations, les produits chinoises ont envahi les marchés et commerces algériens au point de tuer ou d’asphyxier le peu de productions locales.

L’eldorado algérien des Chinois a commencé au début des années 2000 lorsque l’ancien président a décidé de lancer de grands projets d’infrastructures à coups de milliards de dollars. La porte d’entrée des entreprises chinoises a été les vastes programmes de logements. Faible coût de réalisation, rapidité d’exécution et disponibilité de main d’œuvre directement amenée de Chine, Pékin rafle des dizaines de marchés dont la réalisation est confiée à un certain Abdelmadjid Tebboune, alors ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat.

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Chantiers emblématiques

Routes, hôtels, barrages hydrauliques, hôpitaux civils ou militaires, transport ferroviaire, terminaux aéroportuaires, pétrochimie, villes nouvelles, bâtiments de grandes administrations : aucun secteur n’échappe à l’appétit des entreprises chinoises. Selon un décompte non exhaustif effectué par Jeune Afrique en 2016, elles ont décroché depuis 1999 pas moins de 80 milliards de dollars de commandes de l’État algérien, dépassant de loin tous les autres partenaires étrangers.

Les deux contrats les plus emblématiques sont celui de l’autoroute Est-Ouest, dont une partie a été confiée à un consortium chinois pour 6,2 milliards de dollars, ainsi que celui de la Grande Mosquée d’Alger, dont le coût de réalisation s’élève à 1,2 milliard d’euros. À l’époque, l’omniprésence de l’empire du Milieu en Algérie est incarnée par la présence massive des travailleurs chinois.

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Jusqu’en 2019, on en dénombrait quelques 40 000 présents sur les différents chantiers aux quatre coins de l’Algérie. Installés dans des bases de vie sur place, ces travailleurs vivaient souvent en vase clos avant de regagner leur pays d’origine une fois le contrat terminé.

Que reste-t-il de cet empire que les Chinois en bâti au cours de la présidence de Bouteflika ? Le nombre de ces expatriés a fortement diminué pour différentes raisons. Les grands projets (logements, autoroutes, Grande Mosquée) ont été achevés, tarissant le flux des travailleurs. Enfin, la chute du régime de Bouteflika a signé la fin des gros contrats d’infrastructures.

La rupture du Covid

La pandémie a aussi précipité le rapatriement des ouvriers, et la crise économique et financière qui a frappé l’Algérie dans la foulée a provoqué le gel des projets dans lesquels les entreprises chinoises avaient grandement prospéré.

Un nouveau cycle est-il en train de s’ouvrir ? Difficile d’y voir clair, entre les annonces officielles et les avancées réelles : un partenariat algéro-chinois a été mis en place en 2016 pour la construction d’un nouveau port commercial prévu sur le site d’El Hamdania, à Cherchell (wilaya de Tipaza) pour 3,3 milliards de dollars.  À l’époque, les promoteurs annonçaient que le port devrait être opérationnel en 2028. Les travaux n’ont toujours pas commencé.

L’autre projet emblématique est le Projet phosphates intégré (PPI) conclu entre les groupes algériens ASMIDAL (filiale de Sonatrach) et Manadjim El Djazair (MANAL) d’une part, et les sociétés chinoises Wuhuan et Tian’an pour un montant de 7 milliards de dollars. « Ce projet permettra à l’Algérie d’être l’un des principaux pays dans le monde dans l’export d’engrais et de fertilisants, expliquait à l’époque le PDG de Sonatrach, Toufik Kakkar. L’Algérie produira alors plus de 6 millions de tonnes de produits phosphatés annuellement. » Là encore, les cartons n’ont toujours pas été ouverts et aucun signe de démarrage n’est visible.

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