Majouja, le meilleur de la cuisine algérienne à deux pas de l’Opéra de Paris

Manger algérien (et kabyle) dans la capitale française ? Une adresse se distingue depuis quelques années, créée par Katia Barek, avec Nora Sadki aux fourneaux !

À la carte du restaurant Majouja, des plats de toute l’Algérie : hmiss, humous zitouni, zaalouk, brick, chorba, couscous, rechta, amekfoul, aghroum farci ou aux herbes, matlouh, mhadjeb… © Majouja

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Publié le 30 septembre 2023 Lecture : 5 minutes.

La longue foule patientant devant le restaurant témoigne du succès de celui-ci. La queue ne désemplit pas, malgré les orages qui s’abattent sur Paris. Dès que l’on met les pieds à l’intérieur, on comprend pourquoi : une délicieuse odeur caresse nos narines. Et le ramage est à la hauteur du plumage, nos papilles vont bientôt découvrir des saveurs exquises. Ce lieu, c’est Majouja, à quelques centaines de mètres de l’Opéra Garnier. Selon l’expression de Katia Barek, sa patronne, « la colonne vertébrale de notre cuisine est kabyle, le corps est algérien ».

Tchoutchouka et tikourbabine

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Ainsi, au menu, des plats venus de toute l’Algérie. Chacun aura le plaisir de retrouver son mets préféré, de découvrir des spécialités culinaires d’autres régions ou de s’initier à la cuisine algérienne. À la carte, hmiss, humous zitouni, zaalouk, brick, chorba, couscous, rechta, amekfoul, aghroum farci ou aux herbes, matlouh, mhadjeb… Et, en supplément le samedi, de la tchoutchouka et du tikourbabine en alternance.

Au dessert, on se régale de makrout, tcharek, baklawa, kalb el louz, bradj, sfenj… Entrée, plats, desserts ont un point commun : préparés par Nora Sadki, ils sont délicieux. L’expérimentée cheffe cuisinière nous raconte une anecdote : « Il y a quelques semaines, un homme a pleuré en mangeant du tikourbabine, qui lui rappelait celui de sa grand-mère décédée. C’est impressionnant de constater comment la nourriture peut faire resurgir des souvenirs… » Elle reste toutefois modeste : « Je suis consciente que mes plats n’auront jamais le goût de ceux de l’enfance. »

Cantine populaire

En seulement deux ans et demi, Majouja est devenu un incontournable du quartier de l’Opéra à Paris. Katia Barek nous en explique le concept : « J’aime bien présenter Majouja non pas comme un restaurant, mais comme une cantine. Nous ouvrons tous les jours du mardi au vendredi de 12 heures à 15 heures et le samedi de 12 heures à 16 h 30. Nous faisons de la vente à emporter et de la livraison. En semaine, je m’adresse à la clientèle de bureau du 9e arrondissement de Paris, où l’on trouve des banques, des assurances, des agences de communication, des start-up et des résidents. Le samedi, il y a plus de clients d’origine algérienne et du Maghreb. Je suis fière du mélange de population que l’on a ici tous les jours. Il est à mon image, je suis à la fois une bobo parisienne assumée et très attachée à mon village en Kabylie. »

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« La cuisine de ma mère »

Son chemin vers la restauration n’était pas tout tracé. Dans sa vie professionnelle précédente, Katia Barek était responsable de la communication : « J’avais fait toute ma carrière chez BNP Paribas, depuis mon stage de fin d’études. J’en suis partie à 39 ans. » Malgré les avantages du salariat dans une grande entreprise, elle a des envies d’ailleurs : « J’ai toujours dit que je ne fêterais pas mon pot de départ à la retraite chez BNP Paribas. Je souhaitais me lancer dans l’entreprenariat et voulais que ma nouvelle activité ait un lien avec mes origines. Je ne savais pas que ce serait dans la restauration. » L’idée de Majouja naît d’un manque : « Quand on déjeunait avec les équipes, on mangeait chinois, japonais, des burgers, des pizzas mais jamais de la cuisine algérienne. Je me suis dit que si je devais ouvrir un lieu de partage et de découverte de la cuisine de ma mère, ce serait dans un quartier parisien de bureau. »

Des parts de kalb el louz du restaurant Majouja, à Paris. © DR

Des parts de kalb el louz du restaurant Majouja, à Paris. © DR

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La famille est un élément central de la vie personnelle de Katia Barek. Elle est aussi à l’origine de son attrait pour la cuisine : « J’ai grandi avec un papa, paix à son âme, dans la restauration. Il a été carreleur, plongeur, cuisinier… Il était passionné, je l’ai toujours vu cuisiner, laver la vaisselle, mais il n’a pas réussi à ouvrir sa propre affaire car il est parti à 50 ans. Ma mère, au foyer, cuisinait à la maison. Tout ce qu’on retrouve, c’est ce qu’elle préparait, avec en plus des spécialités d’autres régions algériennes. » C’est d’ailleurs en l’honneur de sa mère que le restaurant a été baptisé ainsi : « Son prénom est Khedoudja. Enfant, ma nièce appelait sa grand-mère “Majouja”. Depuis quinze ans, toute la famille l’a imitée. Quand j’ai annoncé à mes deux sœurs que j’allais quitter la communication pour ouvrir un restaurant, elles ont tout de suite deviné que je lui donnerais ce nom. C’était une évidence. Je suis fière d’avoir donné le surnom de ma mère à mon restaurant et d’avoir fait ce que mon père aurait aimé faire s’il était encore là. »

Pandémie et propriétaire compréhensif

Flattée de cet hommage, sa mère a tout de même eu peur quand sa fille lui a annoncé son changement de carrière. « Elle m’a dit cette phrase en kabyle dont je me souviens encore : “Tu vas attendre que le client entre.” Maintenant, quand elle vient au restaurant, elle me demande si je ne suis pas trop fatiguée ! » Les craintes maternelles ont bien failli se justifier dans le contexte très particulier de la pandémie de Covid-19 : « Nous devions ouvrir en novembre 2020, mais à cause du confinement, cela ne s’est produit qu’en mars 2021. Quand, après vingt ans dans la banque, vous lancez votre affaire et que vous commencez juste au moment d’un événement sans précédent dans l’histoire de la restauration, vous vous dites que vous avez la poisse ! »

Heureusement, une bonne étoile flotte au-dessus du destin de Majouja : « Mon propriétaire a été très compréhensif et nous a accordé un délai. » Et Katia Barek a transformé le coup du sort en épreuve à surmonter : « Nous nous sommes adaptés. Quand nous avons ouvert, nous ne faisions que du click and collect et de la livraison. Cela nous a permis de nous roder et de faire des ajustements dans la carte pendant trois mois. Nous étions prêts quand les premiers clients se sont assis à nos tables, en juin. »

Noyés sous l’affluence

Quand on lui demande quels sont ses projets, Katia Barek est catégorique : « Je ne veux pas créer une chaîne. Je ne veux pas sacrifier la qualité au profit du quantitatif. Si j’ouvre un autre restaurant, ce ne sera pas pour faire exactement la même chose. » Elle se souvient d’une expérience récente : « Beaucoup de monde disait que c’était dommage de n’ouvrir que le midi. Nous avons cédé à la demande générale et nous avons étendu notre service à certains soirs. Mais nous avons été noyés sous l’affluence et nous sommes revenus au concept de base, celui de la cantine ouverte pour la pause déjeuner. »

Une exception : « Pendant le Ramadan, nous servons tous les soirs, sur réservation. L’année dernière, nous avons été complets quinze jours avant le début du mois de jeûne. » Et la cheffe d’entreprise satisfaite de conclure : « La plus belle reconnaissance, c’est que les clients de Majouja reviennent. »

On veut bien la croire, car après cette succulente dégustation, nous retournerons assurément goûter les autres plats de la carte, dont notre tikourbabine de Proust.

Majouja, restaurant, 43 rue Laffitte, 75009 Paris

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