Le Gabon part à la chasse aux sorciers étrangers

Le Conseil national des rites et traditions a donné six mois aux marabouts étrangers pour quitter le pays.

 © Damien Glez

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Publié le 31 octobre 2023 Lecture : 2 minutes.

En trompe l’œil ou non, le souffle de la « restauration » continue d’animer le Gabon post-Ali Bongo Ondimba, et pas seulement au sein des corps habillés ou au cœur du Landernau politicien. Le 27 octobre dernier, le Conseil national des rites et traditions du Gabon mettait en place son bureau ad hoc. Une première, si l’on en croit Junior Xavier Ndong Ndong, intronisé à sa tête : « C’est une responsabilité historique, parce que c’est la première fois que les enfants du Gabon, propriétaires du pays, s’organisent pour créer une fédération qui va parler des rites et traditions de leur pays. » Certain que « la tradition du Gabon va devenir [sa] pierre angulaire », le promu du jour emploie vraisemblablement l’expression « propriétaires du pays » à dessein…

Rhétorique patriotique

C’est qu’une petite rhétorique patriotique planait sur la cérémonie d’intronisation, prenant des airs plutôt chauvins. « À partir de ce jour, a martelé Junior Xavier Ndong Ndong, tous ceux qui pratiquent les fétiches, les marabouts étrangers sur le territoire gabonais, ont six mois pour arrêter et partir du Gabon. »

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Plutôt radicale, la mesure est censément politique, le responsable du Conseil national des rites et traditions du Gabon rebondissant après des expériences de porte-parole de parti politique et de conseiller proche de certains régimes. Et il faudra bien que la mesure soit officiellement appliquée…

Des observateurs lisent dans l’ultimatum lancé aux féticheurs étrangers une démarche populiste conforme à certains avis répandus dans la population. Des citoyens décrivent une cohabitation pénible entre les savoirs traditionnels gabonais et les rites étrangers, que ces derniers soient importés de pays voisins ou d’Afrique de l’Ouest, notamment de la sphère vaudou. Après les propos de Junior Xavier Ndong Ndong, les langues se délient, sur les réseaux sociaux ou dans les forums des titres de presse, dénonçant des incantations “ »étranges » et incompatibles avec le folklore du terroir, ainsi que des cérémonies intempestives, parfois organisées dans des espaces publics.

En « off », certains décrivent davantage une sorte de « jalousie », les marabouts étrangers ayant la réputation de louer leurs services aux plus fortunées des personnalités de la place, des politiciens manifestement sensibles à l’exotisme de certaines amulettes. Des féticheurs expatriés entretiendraient publiquement cette image d’introduits, tant par la publicité de leurs activités que par leurs signes extérieurs de richesse. Les citoyens critiques ne considèrent pas pour autant ces féticheurs comme des charlatans. Le site www.gabonreview.com cite ainsi un habitant du quartier librevillois Belle-Vue II : « Ils nous maraboutent. Ce qui explique le fait qu’ils restent là malgré nous. »

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