Au Congo, Moody’s est moins optimiste que Standard and Poor’s

Alors que Brazzaville semble garder la tête hors de l’eau, il reste pourtant fort à faire. C’est du moins ce qui ressort du dernier rapport de Moody’s Investors Service qui a maintenu la note du Congo à « Caa2 » avec une « perspective stable ».

Siège de Moody’s Corporation à Manhattan, New York, le 12 novembre 2021. © Andrew Kelly/REUTERS

Siège de Moody’s Corporation à Manhattan, New York, le 12 novembre 2021. © Andrew Kelly/REUTERS

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Publié le 8 novembre 2023 Lecture : 3 minutes.

Le Congo-Brazzaville s’est vu réattribuer par Moody’s Investors Service la note de Caa2 (risque de crédit très élevé), assortie d’une perspective stable. Une notation qui exprime une confiance modérée dans la capacité du pays à gérer son équilibre financier, et qui contraste avec la vision plus optimiste de Standard & Poor’s (S&P). Cette dernière a en effet relevé en août la note du Congo en la faisant passer de B- à B sur le court terme et de CCC+ à C sur le long terme, avec une perspective stable sur la base d’une amélioration notable de sa production pétrolière.

Ainsi, là où S&P s’emballe, Moody’s appelle à la prudence, soulignant que malgré l’augmentation des revenus pétroliers, ceux-ci ne seront probablement pas suffisants pour apurer rapidement la dette publique du pays qui avoisine les 98 % du PIB d’après le ministère de l’économie.

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Le « mal hollandais »

Face à cette dette et à des arriérés fiscaux importants, le Congo reste dépendant aux hydrocarbures qui constituent plus de 50 % de ses revenus et 70 % de ses exportations, d’après l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). Un cas d’école du « mal hollandais », où la dépendance excessive aux revenus pétroliers augmente la vulnérabilité du pays face aux fluctuations du marché et fragilise son profil de crédit, tout en entravant les initiatives de diversification économique.

Bien que les prévisions du FMI indiquent une hausse de la production pétrolière congolaise, qui devrait passer de 260 000 à 300 000 barils par jour sur les trois prochaines années, cette expansion repose sur des investissements significatifs, lesquels sont eux-mêmes conditionnés par la stabilité des prix du pétrole sur les marchés mondiaux. Dans le rapport, les analystes de Moody’s indiquent que « face à une dette publique conséquente sans stabilisateurs économiques, le Congo est vulnérable aux crises de liquidité lors de chocs pétroliers, ce qui menace sa capacité de remboursement de la dette. Et que même une augmentation des revenus du pétrole ne réglerait pas rapidement les arriérés fiscaux de l’État. »

Ce syndrome est exacerbé par une gestion financière « inadéquate », un climat d’investissement terni par la corruption ainsi qu’un cadre réglementaire considéré « inefficace ». Et ce malgré l’entrée en vigueur de nouvelles mesures législatives et la mise en place récente d’une agence spécialisée dans la lutte contre les flux illicites. Selon Moody’s, ces obstacles inhibent les progrès réformistes et amplifient les risques financiers, compromettant d’autant plus la capacité du Congo à remplir ses engagements financiers.

Le piège de la dette

L’agence critique notamment les « trop faibles » efforts de gouvernance et souligne la vulnérabilité du profil de liquidité du Congo. Précisément, le score d’incidence de crédit ESG (critères utilisés pour évaluer les performances éthiques et durables) du pays, positionné à CIS-5, traduit un très haut risque en matière de gestion publique, dans un pays historiquement marqué par des défauts de paiement.

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D’une part, ces éléments, combinés à une diversification fiscale limitée, ainsi qu’à des risques politiques significatifs liés à la succession, maintiennent le pays dans une zone de risque de défaut de paiement.

D’autre part, Moody’s reconnaît les initiatives de consolidation budgétaire du Congo, destinées à alléger le fardeau de la dette et à dégager de l’espace budgétaire grâce à un élargissement de l’assiette fiscale, et à une baisse des subventions. D’autres éléments positifs ont également été soulignés : le plafond de crédit en monnaie locale du Congo est resté stable à B2, bénéficiant de la sécurité offerte par son intégration dans la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), qui compense en partie les défis de gouvernance du pays.

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Ainsi, si le Congo parvient à alléger la pression sur ses liquidités, en renforçant la gestion de ses flux monétaires et en affichant des progrès tangibles dans la gestion de sa dette, Moody’s a indiqué être susceptible de rehausser sa note.

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