Monarques, carbone et dollars : une COP28 hors normes s’ouvre à Dubaï

Une première décision pourrait intervenir dès le 30 novembre avec la mise en œuvre du nouveau fonds pour compenser les pertes et dommages liés au climat dans les pays en développement.

Drapeaux nationaux des pays participants sur le site du sommet des Nations unies sur le climat COP28 à Dubaï, le 30 novembre 2023. © Karim SAHIB / AFP

Drapeaux nationaux des pays participants sur le site du sommet des Nations unies sur le climat COP28 à Dubaï, le 30 novembre 2023. © Karim SAHIB / AFP

Publié le 30 novembre 2023 Lecture : 4 minutes.

Les Émirats ont vu les choses en grand : le petit pays pétrolier du Golfe a dépensé sans compter pour accueillir la 28e conférence des Nations unies sur le changement climatique, censée inciter les pays à passer la vitesse supérieure sur la transition énergétique.

Aux portes du désert, à Dubaï, le site de l’Exposition universelle de 2020 devient pour deux semaines le cœur battant de la diplomatie climatique, les Émirats et l’ONU espérant une COP aussi historique que celle de Paris en 2015.

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« Évidemment, je suis fortement en faveur d’un texte qui inclue la sortie (des énergies fossiles) », même avec un calendrier progressif, a déclaré le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres dans un entretien à l’AFP, avant de s’envoler pour Dubaï.

« C’est la COP la plus importante depuis Paris », selon le chef de l’ONU Climat, Simon Stiell. « Nous avançons aujourd’hui à petits pas, alors qu’on attend des pas de géants. »

C’est la deuxième fois qu’un pays du Golfe accueille une COP, après le Qatar en 2012. Les conférences de l’ONU Climat changent généralement de continent chaque année; il y a deux ans, les pays d’Asie Pacifique avaient désigné les Émirats pour cette COP.

Conflits d’intérêts ?

Mais le président de la COP28, Sultan Al Jaber, également directeur général de la compagnie pétrolière nationale Adnoc, est sous le feu des critiques après la publication par la BBC et le Centre for Climate Reporting de notes internes de préparation de réunions officielles énumérant des arguments pour la promotion des projets d’Adnoc à l’étranger. Il a rejeté ces accusations mercredi.

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Si des personnalités et ONG crient au scandale, un boycott de la COP28 n’est pas à l’ordre du jour, tant les enjeux sont vertigineux et évidents à la fin d’une année de surchauffe météo.

Antonio Guterres a lui-même défendu l’intérêt d’avoir l’Émirati aux commandes de la COP pour parler de la sortie des énergies fossiles : « Je pense qu’il est dans une meilleure position pour dire ça à ses collègues de l’industrie des énergies fossiles que s’il était membre d’une ONG avec un bilan pro-climat solide ».

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La première grande décision de la COP28 pourrait intervenir dès le 30 novembre, avec l’adoption en séance plénière de la mise en œuvre du nouveau fonds pour compenser les pertes et dommages liés au climat dans les pays vulnérables, après un an de négociations très tendues entre pays du Nord et du Sud. Cette adoption dès le premier jour permettrait aux délégués de se concentrer sur les autres batailles à l’ordre du jour, à commencer par les énergies fossiles.

Avec Charles III mais sans le pape

Plus de 97 000 personnes (délégations, médias, ONG, lobbys, organisateurs, techniciens…) sont accréditées, deux fois plus que l’an dernier, et environ 180 chefs d’Etats et de gouvernements sont attendus selon les organisateurs d’ici le 12 décembre, fin théorique de la conférence.

Le pape François, grippé, a annulé sa venue, mais plus de 140 dirigeants défileront à la tribune vendredi et samedi, après la journée cérémonielle d’ouverture jeudi, pour des discours de quelques minutes censés donner une impulsion politique aux négociations byzantines qui occuperont les délégations pendant deux semaines.

Le roi Charles III s’exprimera vendredi en ouverture de ce sommet de dirigeants, sans Joe Biden, remplacé par sa vice-présidente Kamala Harris, ni Xi Jinping.

Le président israélien Isaac Herzog et le chef de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas pourraient se croiser car ils sont inscrits pour s’exprimer à quelques minutes d’intervalle, le 1er décembre.

Les Émiratis préparent un déluge inaugural d’engagements volontaires d’États pour, par exemple, tripler les renouvelables d’ici 2030 ou doper les aides financières des pays riches vers les plus vulnérables.

Mais seuls les textes officiels adoptés pendant la COP, dans le méticuleux processus onusien où le consensus est obligatoire, auront une force comparable à ce que fut l’accord de Paris. Un fiasco n’est pas à exclure, tant les résistances à parler explicitement des fossiles sont fortes chez certains pays producteurs.

Utilité des COP

La question est légitime, puisque depuis la COP21 et l’accord de Paris, les émissions de gaz à effet de serre ont continué à augmenter. Mais alors qu’on tablait à l’époque sur 16 % d’augmentation d’ici 2030, l’ONU Environnement ramène désormais la hausse à 2 %.

Ce ralentissement n’est pas attribuable au seul texte mais la transition énergétique est indéniablement engagée, bien que plaçant toujours le monde sur une trajectoire de réchauffement invivable.

Depuis 2015, une centaine de pays se sont engagés à la neutralité carbone, le solaire est devenu l’énergie la moins chère pour générer de l’électricité, le pic de la demande en énergies fossiles est en vue cette décennie et l’Agence internationale de l’énergie s’attend à ce que plus du tiers des voitures neuves dans le monde soient électriques en 2030, un scénario impensable avant 2015.

(Avec AFP)

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