En Côte d’Ivoire, le petit poucet GNA Assurances chahute les leaders

Assurances agricoles, restructuration, apports en fonds des actionnaires… Cinq ans après avoir frôlé le dépôt de bilan, l’assureur ivoirien a multiplié par vingt son chiffre d’affaires et se rapproche du numéro un ivoirien, Sanlam, sur le segment IARDT (incendies, accidents, risques divers et transports).

Romuald Kouassi, directeur général de GNA Assurances depuis 2019. © GNA.

Romuald Kouassi, directeur général de GNA Assurances depuis 2019. © GNA.

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Publié le 23 janvier 2024 Lecture : 3 minutes.

Le siège de la Conférence interafricaine des marchés d’assurances (Cima), à Libreville. © Cima
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Assurances : l’Afrique à un tournant décisif

Empreint des réflexes traditionnels du métier, le secteur, encore fractionné et composé d’entreprises familiales, est en train de se moderniser plus ou moins rapidement grâce à la démocratisation des smartphones. Encore faut-il que la réglementation suive.

Sommaire

L’histoire de Génération nouvelle d’assurances (GNA-CI), fondée en 2007 par le défunt hommes d’affaires Antoine Vidjanagni, aurait pu tourner court. Après douze ans d’existence, la compagnie est passée en 2019 tout près de mettre la clé sous la porte. Elle enregistre alors des pertes colossales, estimées à 774 millions de F CFA (1,18 million d’euros), entrant directement à la dernière place des acteurs du secteur. Placée sous l’étroite surveillance du régulateur du secteur, la Commission régionale de contrôle des assurances (CRCA), et sous administration provisoire, GNA Assurances s’en remet à l’Ivoirien Romuald Kouassi, appelé à la rescousse par les actionnaires. Celui-ci entame alors une restructuration express de 94 jours.

Un chiffre d’affaires multiplié par 20

Une bouffée d’oxygène qui permet à la compagnie située dans le quartier du Plateau, à Abidjan, d’entamer sa mue. « Cela nous a servi d’électro-choc pour la relance des activités. Personne ne pariait alors sur GNA, mais nos résultats aujourd’hui surprennent le marché. Nous restons néanmoins lucides tant les challenges sont multiples dans notre secteur », souligne avec insistance Romuald Kouassi, le dirigeant de la compagnie, précisant que cette dernière n’a atteint que 30 % de son potentiel.

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Ce satisfécit est surtout lié aux solides performances réalisées ces dernières années. Depuis son lancement, l’entreprise a ainsi multiplié son chiffre d’affaires par 20. Rien qu’entre 2020 et 2022, les revenus sont passés de 5,8 milliards à 28,1 milliards de F CFA, soit une hausse de 384 %.

En 2023, le chiffre d’affaires s’est établi à 40 milliards, pour un résultat net de 2 milliards de F CFA. Une performance qui hisse GNA à la deuxième place, derrière le leader incontesté Sanlam, sur le marché ivoirien très convoité de la branche non-Vie, estimé à 303 milliards de F CFA. La croissance rapide du petit poucet aux capitaux ivoiriens ravive la compétition sur un marché dominé jusque-là par le poids lourd sud-africain, avec 21 % des parts.

Management original

Pour en arriver là, les actionnaires ont dû mettre la main au portefeuille et injecter quelque 3 milliards de F CFA nécessaires à la mise en œuvre du plan de relance. Un nouvel aréopage entre les actionnaires et le personnel, qui prend une part importante au tour table, est scellé. Avec un capital social de 5 milliards de F CFA, GNA Assurances revendique aujourd’hui un modèle basé sur le management buy out (rachat de l’entreprise par les cadres).

La mise en œuvre des recommandations du régulateur, l’arrivée d’un nouveau directeur général, ainsi que la recomposition du conseil d’administration avec la cooptation de poids lourds de l’industrie des assurances – à l’image du Sénégalais Adama Ndiaye, ancien patron du CRCA et de la Fédération des sociétés d’assurances de droit national africaines (Fanaf) – impulsent un renouveau.

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Outre l’apport en fonds propres conséquent, les dirigeants ont porté leurs efforts sur la maîtrise des frais généraux – qui représentent 50 % du chiffre d’affaires –, tout en faisant le pari des niches. « Nous avons mis en place de nouvelles prestations, comme un centre d’indemnisation accélérée qui permet de régler un sinistre automobile matériel en moins de quatre heures », précise Romuald Kouassi. Cette célérité permet à l’assureur de grappiller des marges sur le segment automobile, désormais sa deuxième source de revenus (13 milliards de F CFA de chiffre d’affaires), derrière l’assurance santé.

Une branche Vie d’ici à 2025

Nouveaux produits et célérité dans le traitement du sinistre sont désormais les maîtres mots de l’assureur. « Grâce à notre connaissance de l’environnement et des acteurs, nous voulons démocratiser l’assurance en couvrant les populations dans toutes leurs activités, et ce, malgré la faiblesse des revenus. C’est pourquoi, nous adaptons nos produits comme Noufala, qui assure à la fois le paysan en cas de perte ou de décès des bœufs de labour et la société cotonnière qui s’assure d’avoir la production escomptée », détaille Joseph Vidjanagni, le directeur de la transformation digitale et de la transformation du groupe. En s’attaquant à l’assurance agricole, GNA entend augmenter la couverture, sur un marché global dont le taux de pénétration (non-Vie) n’excède pas 0,7 % de la population ivoirienne.

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Et la recette porte ses fruits, GNA Assurances, présente dans une dizaine de villes, table sur des collaborations avec des courtiers « majors » et des locaux tels Willis, Ascoma ou encore Olea pour pénétrer les marchés de niche. D’ores et déjà, avec une prime de 15 000 F CFA, Noufala a permis de coopter plus de 20 000 adhérents sur les 106 000 producteurs ivoiriens de coton. « Nous continuons à développer des produits digitaux, comme la plateforme que nous allons mettre en service. Nous voulons ainsi consolider notre position et ouvrir la branche Vie de GNA Assurances d’ici à l’horizon 2025 », annonce Romual Kouassi.

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