Projet de loi sur les partis en Algérie : un texte potentiellement liberticide

En cours d’élaboration, l’avant-projet de loi organique sur les partis politiques semble taillé sur mesure pour permettre à l’État de placer sous contrôle l’activité des partis, et ce à quelque mois de la présidentielle. Tollé au sein de l’opposition.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune. © Billel Bensalem/APP/NurPhoto via AFP

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune. © Billel Bensalem/APP/NurPhoto via AFP

Publié le 3 avril 2024 Lecture : 2 minutes.

Au mois d’août 2023, lors de son entrevue périodique avec les représentants des médias nationaux, Abdelmadjid Tebboune avait esquissé la ligne directrice de la révision de la loi portant sur l’activité des formations politiques.

Les partis, avait rappelé le chef de l’État à cette occasion, « sont libres de tracer leurs propres programmes politiques, mais ils doivent avoir un dénominateur commun : l’unité nationale et la Déclaration du 1er novembre, qui appelle à l’édification d’un État démocratique social. Tout ce qui est de nature à renforcer le front intérieur et qui relève de la ligne nationale est le bienvenu ».

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Les partis politiques n’ont pas encore reçu de copie du texte, toujours en cours d’élaboration, mais les quelques échos qui leur parviennent ne présagent pas, disent-ils, d’une « ouverture démocratique », à quelques mois de l’élection présidentielle anticipée du 7 septembre.

Zoubida Assoul dénonce un « verrouillage »

Parmi les principales dispositions de l’avant-projet de loi figure notamment l’interdiction faite aux partis d’organiser des activités au niveau de leur siège et de constituer des comités permanents nationaux ou locaux chargés des travailleurs, des chômeurs, des femmes ou des jeunes.

Les alliances contractées entre formations doivent par ailleurs être déclarées au ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales, qui aura la prérogative de les accepter ou de les rejeter.

« J’attends de recevoir une copie du texte pour avoir une idée précise. A priori toutefois, selon nos informations, ce texte de loi consacre davantage de verrouillage. Par exemple, si un parti politique ne participe pas à quatre élections, on lui retire l’agrément. Le boycott est ainsi sanctionné », proteste Zoubida Assoul, présidente du parti l’Union pour le changement et le progrès (UCP) et candidate déclarée à l’élection présidentielle du 7 septembre.

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« La fin du multipartisme », selon Athmane Mazouz

« Ce texte de loi sur les partis politiques, je l’ai lu et je peux vous dire que c’est la fin du multipartisme. Ils veulent fermer cette parenthèse ouverte en 1992. Il contient une disposition qui stipule que, si une formation politique veut contester quoi que soit, elle doit saisir par écrit le chef du gouvernement. C’est absurde. Un parti politique doit prétendre à la prise du pouvoir et dénoncer publiquement », s’insurge de son côté Athmane Mazouz, président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD).

Dans un communiqué sanctionnant les travaux de la réunion de son conseil national qui s’est tenue le 3 février 2024, le parti de Sofiane Djilali, Jil Jadid, a relevé, en outre, « une marginalisation persistante et contre-productive de la vie politique ». Le parti a estimé que « remplacer les formations politiques par une société civile légalement non concernée par la politique interpelle sur les intentions des autorités ».

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« S’il est impossible de revenir au parti unique, poursuit le mouvement, il serait également irresponsable d’envisager des appareils politiques embrigadés pour servir de faire-valoir. »

Aucune date n’a été fixée pour l’adoption de cet avant-projet de loi, qui risque d’opérer un nouveau tour de vis de l’activité politique. Pour tous, la grande question est donc de savoir s’il entrera en vigueur avant la présidentielle anticipée de septembre prochain.

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