« Rwanda : témoins du génocide » : Jean-François Dupaquier, Étienne Nsanzimana, Louise Mushikiwabo, Faustin  Murangwa et Jean Hatzfeld. © MONTAGE JA : YVES FORESTIER pour JA
« Rwanda : témoins du génocide » : Jean-François Dupaquier, Étienne Nsanzimana, Louise Mushikiwabo, Faustin Murangwa et Jean Hatzfeld. © MONTAGE JA : YVES FORESTIER pour JA

[Série] Rwanda : témoins du génocide

Trente ans après, le génocide des Tutsi au Rwanda reste une plaie ouverte. Louise Mushikiwabo, Étienne Nsanzimana, Jean-François Dupaquier, Jean Hatzfeld, Faustin Murangwa… Suivez notre série de témoignages en vidéo.

Publié le 3 avril 2024 Lecture : 3 minutes.

« Rwanda : témoins du génocide » : Jean-François Dupaquier, Étienne Nsanzimana, Louise Mushikiwabo, Faustin  Murangwa et Jean Hatzfeld. © MONTAGE JA : YVES FORESTIER pour JA
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Rwanda : témoins du génocide

Trente ans après, le génocide des Tutsi au Rwanda reste une plaie ouverte. Étienne Nsanzimana, Jean-François Dupaquier, Jean Hatzfeld, Faustin Murangwa, Louise Mushikiwabo… Suivez notre série de témoignages en vidéo.

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Trois décennies se sont écoulées. Et pourtant, le génocide des Tutsi au Rwanda n’en finit pas de hanter les mémoires et les consciences. Comment un tel crime de masse a-t-il pu se produire ? Quel a été le rôle de la France ? La justice est-elle possible après un tel cataclysme ? Comment reconstruire et se reconstruire, après une telle tragédie ? Comment continuer à vivre, malgré tout, malgré les crimes, malgré les absents ?

À la veille des commémorations des 30 ans du génocide, qui débuteront le 7 avril à Kigali, Jeune Afrique a interrogé celles et ceux qui ont vécu les faits au plus près ou qui, depuis trente ans, en ont fait le cœur de leur travail. Cinq témoins, cinq épisodes, pour autant de face-à-face en vidéo avec, chaque fois, cette question : comment cela a-t-il été possible ?

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RTLM, média de la haine

Étienne Nsanzimana, ancien président de l’association des rescapés du génocide Ibuka France, s’est donné pour mission de perpétuer la mémoire des victimes. Il a choisi de nous parler des prémices : la manière dont la Radio-Télévision libre des Mille Collines (RTLM) a été le canal privilégié d’endoctrinement, propageant la haine ethnique envers les Tutsi jusque dans les moindres recoins du pays. « C’était très bien fait de leur part, parce qu’ils alternaient des messages drôles, de la bonne musique, nous raconte-t-il. Et après, ils utilisaient des mots codés pour parler des Tutsi. » De la haine pure, distillée entre deux tubes pop. « Ceux qui devaient comprendre comprenaient. »

Jean-François Dupaquier, journaliste indépendant spécialiste du génocide au Rwanda, revient pour sa part sur les fondements idéologiques qui ont conduit la France de François Mitterrand à soutenir, diplomatiquement et militairement, le régime ethniciste devenu génocidaire. À l’époque, explique-t-il notamment, les politiques et les militaires français avaient une grille de lecture principale : défendre coûte que coûte le « pré carré » français face aux « Khmers noirs » du Front patriotique rwandais (FPR).

Devoir de mémoire et justice

Au lendemain du génocide, dans un pays en plein chaos, une question cruciale s’est posée : comment juger les coupables ? Alors que les tribunaux classiques étaient incapables de faire face, les gacaca, des tribunaux populaires traditionnels, se sont mis en place. Ils ont jugé plus de deux millions de génocidaires présumés, dans les collines et les villages. « C’était une justice en laquelle la population faisait confiance, parce que c’était une justice de proximité », raconte l’avocat rwandais Faustin Murangwa. Grâce à cette œuvre de justice communautaire, « beaucoup de gens sont passés aux aveux » et ces procès publics ont permis, en même temps que la nécessaire catharsis, de « désamorcer les tensions ».

Le romancier Jean Hatzfeld, auteur de quelques-uns des livres les plus marquants et les plus lus sur le génocide, revient pour sa part sur la difficulté pour les rescapés de raconter l’indicible. « Au début, quand on est face aux survivants, on pense que le plus difficile, c’est l’horreur et la douleur. L’horreur de ce qu’ils ont vu et la douleur de ce qu’ils ont perdu », raconte-t-il. Mais au fil des années, il réalise que c’est le souvenir d’avoir été considérés comme des animaux, chosifiés, qui provoque ce qu’il qualifie de « blocages, qui ont empêché les souvenirs de revenir ».

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Notre dernier témoin est Louise Mushikiwabo, secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie et ancienne ministre des Affaires étrangères du Rwanda. Elle était aux États-Unis lorsque le génocide a été commis. Une partie de sa famille a été massacrée par les Interahamwe. « Ma revanche, ma vengeance, c’est de bien vivre, d’être forte et de confronter l’adversité », nous a-t-elle confié. « Je suis aussi beaucoup plus forte parce qu’aujourd’hui, je vis un peu leur vie. J’ai l’impression que je me suis forcée à vivre, à bien vivre pour compenser leur absence. »

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