L’Algérie produira cet été son premier vaccin antigrippal

Depuis plusieurs années, Alger souhaite sortir de la dépendance en matière de médicaments et développer une industrie pharmaceutique forte potentiellement exportatrice. La production de vaccins s’inscrit dans cette politique.

Le laboratoire Biopharm, groupe pharmaceutique algérien créé en 1991. © DR

Le laboratoire Biopharm, groupe pharmaceutique algérien créé en 1991. © DR

Publié le 8 avril 2024 Lecture : 4 minutes.

Le premier lot de vaccin antigrippal produit sur le sol algérien sortira des chaînes de production au mois de juillet 2024, promettent les autorités sanitaires. Cela grâce à un accord entre le groupe pharmaceutique public Saidal et l’Institut Pasteur d’Algérie, qui entrera en vigueur immédiatement après le mois de ramadan. Problématique dont l’importance a été particulièrement mise en évidence lors de la pandémie de Covid, la production locale de vaccin est une priorité pour Alger, l’ambition étant non seulement de produire les sérums, mais aussi la matière première nécessaire à leur préparation, ce qui permettra de renforcer la sécurité sanitaire du pays et dynamiser son industrie pharmaceutique.

Le vaccin contre la grippe n’est d’ailleurs qu’une première étape, et des discussions avancées sont en cours entre l’Institut Pasteur d’Algérie et des fournisseurs étrangers pour un transfert de technologie qui permettra au pays d’élargir sa gamme de production. À court terme, l’Algérie – premier pays de la région Maghreb et Moyen-Orient à couvrir 70 % ses besoins en médicaments –  prévoit d’assumer 50 % de ses besoins en vaccins. Ce qui devrait réduire de moitié le budget consacré à la mise en œuvre du programme national de vaccination, évalué à 36 milliards de dinars (environ 245 millions d’euros) dans la loi de finances de 2024.

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Plus grand producteur public algérien de médicaments, Saidal va également commencer à produire, à partir de juin 2024, la matière première nécessaire à la fabrication des antibiotiques. Saidal annonce une production d’une valeur totale de 850 millions de dollars. Sachant que les besoins du pays sont chiffrés à 250 millions de dollars, le groupe public mise donc sur l’exportation de la majorité de cette production. Globalement, le groupe estime que la fabrication de toutes ces matières premières permettra de réduire la facture des importations de 1,1 milliard de dollars d’ici à 2026.

Nouveaux médicaments et hausse du chiffre d’affaires

Concernant les deux grandes catégories de produits que le pays ne produit pas – ou pas en quantités suffisantes – et qu’il doit importer massivement, à savoir les médicaments oncologiques et l’insuline, le PDG de Saidal, Wassim Kouidri, a annoncé qu’ils commenceraient à être produits dans des délais respectifs de 18 et de 36 mois, le groupe ayant prévu pour cela un investissement qui avoisinera les 11 milliards de dinars, étalé sur trois ans.

Aujourd’hui, Saidal dispose de huit sites de production desquels sortent 160 médicaments différents répartis sur 20 classes thérapeutiques, avec une capacité de production annuelle estimée à 130 millions d’unités de vente en 2023. Ce nombre passera à environ 300 produits au cours de l’année 2024, affirme le groupe public. Parmi les nouveaux produits annoncés figureront 30 médicaments traitant les maladies cardiovasculaires, ce qui devrait contribuer à une nouvelle hausse du chiffre d’affaires de Saidal. Celui-ci s’est établi à 19 milliards de dinars en 2023 contre 14,6 milliards de dinars en 2022, soit une progression de 35 %.

Levier de croissance

En Algérie, le tissu industriel compte actuellement 203 entreprises privées et publiques spécialisées dans la production pharmaceutique. Ces firmes produisent 3 327 médicaments sur les 4 544 enregistrés dans la nomenclature nationale, selon les chiffres du ministère de l’Industrie et de la Production pharmaceutique. Le lancement de la production locale d’insuline a déjà permis de réduire la facture de l’importation de ce produit de près de 100 millions d’euros en 2023, et l’octroi d’une licence à l’usine d’assemblage de stylos à insuline de Boufarik devrait réduire la facture de 44 millions d’euros supplémentaires.

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Après avoir longtemps pesé sur les finances publiques du fait de l’importance des importations, le secteur pharmaceutique pourrait donc devenir, grâce au renforcement de l’industrie locale, un levier de croissance. La création en 2020 d’un ministère de l’Industrie pharmaceutique fait partie des mesures qui ont permis cette évolution, en contribuant à la mise à niveau du cadre réglementaire régissant le secteur. En particulier pour tout ce qui concerne la fixation des prix, l’enregistrement des produits pharmaceutiques et le système d’information permettant le suivi des stocks disponibles sur le marché.

Libérer les exportations

En décembre 2023, le pays a aussi inauguré un centre de bioéquivalence, chargé de contrôler l’équivalence thérapeutique entre un médicament générique et un médicament princeps. La présentation d’une étude de bioéquivalence dans le dossier d’enregistrement de tout nouveau produit générique est obligatoire en Algérie, mais faute de centres spécialisés dans ce domaine, la réalisation de ces études était jusqu’alors impossible. Cela constituait un frein considérable pour les producteurs algériens qui, pour se conformer à la réglementation, n’avaient d’autre choix que de sous-traiter cette phase importante du développement des médicaments auprès d’organismes spécialisés étrangers, principalement en Inde et en Jordanie. Des procédures longues et coûteuses.

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Malgré ces avancées, toutefois, les exportations algériennes de produits pharmaceutiques restent, à ce jour, d’un niveau décevant, avec une valeur totale de moins de 3 millions de dollars en 2023. L’Union nationale des opérateurs de la pharmacie (Unop) a donc émis une liste de préconisations afin de dynamiser les ventes vers l’étranger, proposant à la fois d’intensifier les échanges maritimes avec les grands ports de l’Afrique de l’Ouest et d’abaisser les taxes et les sanctions appliquées.

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