En France, un dirigeant du RN veut supprimer la double nationalité… puis rectifie

Convaincus de leur victoire lors des élections législatives anticipées du 30 juin et du 7 juillet, certains dirigeants d’extrême droite commencent déjà à détailler les mesures qu’ils prendront en arrivant au pouvoir. Quitte, comme Sébastien Chenu, à contredire le programme du parti.

Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement national, à Paris, le 2 juin 2024. Sebastien Chenu, Porte-parole du Rassemblement National.
.Paris, FRANCE – Le 02.06.2024.
© :Chang Martin/SIPA

Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement national, à Paris, le 2 juin 2024. Sebastien Chenu, Porte-parole du Rassemblement National. .Paris, FRANCE – Le 02.06.2024. © :Chang Martin/SIPA

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Publié le 14 juin 2024 Lecture : 3 minutes.

« Une nationalité vous en avez une et elle dit beaucoup de ce que vous êtes et de ce à quoi vous êtes attaché. On ne peut pas être Français pour certaines choses et Uruguayen pour d’autres ». Pourquoi « Uruguayen », on l’ignore, toujours est-il que ces propos ont été tenus le 13 juin au soir par Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement national, député et vice président de l’Assemblée nationale, sur le plateau de l’émission Touche pas à mon poste.

L’ambiance de « TPMP », animée par Cyril Hanouna, incite à ce genre de déclarations à l’emporte-pièces et l’élu du parti de Marine Le Pen était encore certainement tout à l’euphorie de l’excellent score réalisé par l’extrême droite lors des élections européennes du 9 juin. L’animateur, d’ailleurs, abonde dans son sens, interrompant un chroniqueur qui tentait d’ouvrir le débat sur la volonté d’assimilation des personnes porteuses de double nationalité.

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« Moi je suis de nationalité française mais je suis d’origine tunisienne, détaille Cyril Hanouna, interrompant avec son habituelle brutalité ses co-animateurs qui tentaient de répondre aux arguments de l’élu RN. Si demain j’avais la nationalité tunisienne et la nationalité française, faudrait que je choisisse et c’est normal, c’est comme dans une équipe de foot… »

Problème : la suppression de la double nationalité, si elle a longtemps figuré dans le programme électoral du Front national puis du mouvement qui lui a succédé, le RN, n’en fait plus partie aujourd’hui. Marine Le Pen elle-même, dans une interview au quotidien Libération en janvier 2022, alors qu’elle faisait campagne pour la présidentielle, avait indiqué y avoir renoncé. « J’ai rencontré des milliers de gens. Par exemple des Marocains qui, juridiquement, ne peuvent renoncer à leur nationalité car leur pays l’interdit. Honnêtement, je préfère mettre ça de côté car c’est comme mettre du sel sur des plaies ouvertes », expliqua-t-elle alors.

Face aux réactions immédiatement provoquées par sa déclaration, Sébastien Chenu a rapidement rectifié son propos via un message sur X : « Interrogé ce soir par Cyril Hanouna, j’ai évoqué la suppression de la double nationalité : Mea culpa. Marine Le Pen a renoncé à cette mesure et ne compte pas revenir dessus ! Au moins c’est clair. Erreur corrigée. »

« Le pauvre Chenu ne sait plus où il habite »

Un message suivi de nombreuses réactions moqueuses parmi lesquelles un post du Garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti : « Marine Le Pen change tellement d’avis que même le pauvre Chenu ne sait plus il habite. Il défend pendant 10 minutes une mesure qu’elle a reniée il y a quelques mois. La mesure en question ? Une broutille ! Supprimer la double nationalité. »

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En France, plusieurs articles du Code civil et un décret adopté en 1993 régissent l’octroi d’une double nationalité, qui dans de nombreux cas est attribuée automatiquement aux enfants nés d’un couple dont l’un des parents est français et l’autre étranger.

Le pays compte, selon les derniers relevés effectués par l’Institut national d’études démographiques (Ined), environ 3,3 millions de personnes détenant une double nationalité, soit 5 % de la population âgée de 18 à 50 ans. Il s’agit en majorité de Franco-Européens (les pays les plus représentés étant le Portugal, l’Espagne et l’Italie). Puis suivent les Franco-Algériens, Franco-Marocains, Franco-Tunisiens et Franco-Turcs.

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« Près de la moitié des immigrés ayant acquis la nationalité française ont conservé leur nationalité d’origine, précisent les chercheurs de l’Ined. Les binationaux sont très rares chez les originaires d’Asie du Sud-Est (moins de 10 %), tandis que plus des deux tiers des immigrés du Maghreb, 55 % des immigrés de Turquie et 43 % de ceux du Portugal combinent la nationalité française et celle de leur pays d’origine. »

Sur le continent africain, seule la RDC interdit absolument toute forme de double nationalité. Le Cameroun, l’Éthiopie et Madagascar y apportent des restrictions mais prévoient des exceptions. Le cas des personnes originaires d’Algérie et de Tunisie est également particulier, puisque ces deux pays ne prévoient aucune procédure permettant de renoncer volontairement à sa nationalité.

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