Kigali tire à boulets rouges sur l’ONU

La réponse du gouvernement rwandais ne s’est pas fait attendre. Suite aux fuites parues dans la presse concernant un rapport de l’ONU qui suspecte ouvertement Kigali de « génocide » en RD Congo, le Rwanda menace de se retirer « des divers engagements pris avec les Nations unies » et se défend en dénonçant un document qui pourrait « amener l’instabilité dans la région des grands Lacs ».

Des soldats rwandais tirent sur des positions rebelles, le 12 juin 1994. © AFP

Des soldats rwandais tirent sur des positions rebelles, le 12 juin 1994. © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 28 août 2010 Lecture : 3 minutes.

C’est une attaque d’une violence rare. Après avoir fait pression sur le secrétaire général Ban Ki-moon pour que le rapport de l’ONU parlant de « génocide » en RD Congo entre 1996 et 1998 et visant Kigali ne soit pas rendu public, le gouvernement rwandais a énuméré ses griefs contre un document qu’il estime être « malveillant, choquant et ridicule ».

Ledit rapport, dévoilé par Jeune Afrique puis par le journal français Le Monde et par la BBC, dans une version quasi définitive, détaille les massacres, viols et pillages qu’auraient commis des militaires de plusieurs pays et notamment du Rwanda au cours des deux guerres qui se sont déroulées au Congo.

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« Toute initiative qui serait prise sur la base de ce rapport nous obligerait à nous retirer des divers engagements que le Rwanda a pris avec les Nations unies, notamment en ce qui concerne les opérations de maintien de la paix », a écrit la ministre des Affaires étrangères rwandaise, Louise Mushikiwabo, au secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon.

Le président du Rwanda, Paul Kagame, le 9 août 2010 à Kigali.

Le président du Rwanda, Paul Kagame, le 9 août 2010 à Kigali (crédit : AFP).

« L’ONU tente de détourner l’attention »

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La meilleure défense étant l’attaque, le gouvernement a également transmis à l’agence rwandaise de presse un communiqué dans lequel il accuse les Nations unies d’avoir laissé publier ce rapport afin de détourner l’attention d’une série de viols commis par des rebelles (suspectés d’être les FDLR) à proximité d’un camp de casques bleus dans l’est de la RDC. Des exactions sévérement condamnées par le Conseil de sécurité de l’ONU et la communauté internationale (dont États-Unis et Union européenne)

« Le moment de la publication de ce rapport est très révélateur » affirme le texte de Ben Rutsinga, membre du bureau du porte-parole du gouvernement. Selon lui; « il semble que les Nations unies tente de détourner l’attention internationale de sa dernière faute dans la région des Grands Lacs où récemment des centaines de congolaises ont été violées sous le regard des forces de maintien de la paix ».

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« Document dangereux et irresponsable »

« Il est immoral et inacceptable que les Nations unies, une organisation qui a échoué dans sa mission d’éviter le génocide au Rwanda et les crises qui ont suivi pour les réfugiés, causes directes des souffrances endurées par le Congo et le Rwanda, accuse maintenant l’armée qui a mis un terme au génocide d’avoir commis des atrocités en RDC », poursuit le communiqué.

Le rapport en question, élaboré par le Haut commissariat de l’Onu aux droits de l’homme et qui devrait – en théorie- être publié en septembre, est en outre qualifié de « document dangereux et irresponsable (…) qui ne peut qu’amener l’instabilité dans la région des Grands Lacs et saper les efforts de stabilisation en cours, particulièrement alors alors que des progrès sans précédents ont été réalisés pour l’établissement de la paix, de la sécurité et la collaboration économique ». Le Rwanda a récemment établi des relations étroites avec la RDC.

Selon Rutsinga le fait que les enquêteurs de Nations unies n’aient pas rencontré (de représentant du) Rwanda « même si ils ont trouvé le temps de rencontrer 200 représentants d’ONG est choquant et montre un mépris pour toute honnêteté ». Selon lui ce rapport est basé sur une méthodologie contestable, avec des éléments de preuves très faibles ». L’ONU ne s’est pas encore exprimé en retour face à ses accusations.

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