Odinga à Clinton : « Nous avons besoin de partenaires, pas de protecteurs! »

A l’occasion de la visite de la secrétaire d’Etat américaine, le premier ministre kenyan invite les Etats-Unis à dépasser le débat sur la gouvernance.

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Publié le 5 août 2009 Lecture : 3 minutes.

Il est 18h55, ce mardi 4 août, quand tout juste sortie de son Boeing 707, la Secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton pose le pied sur le sol kenyan. Le pays qui a vu naître le père de Barack Obama est la première étape d’un voyage de onze jours qui la conduira ensuite en Angola, au Nigeria, en Afrique du Sud, au Libéria, en République démocratique du Congo et au Cap Vert. Sur le tarmac de l’aéroport Jomo Kenyatta, elle est accueillie par le ministre des Affaires étrangères Moses Wetangula et l’ambassadeur américain Michael Ranneberger.

Dans la foule, de nombreux militaires et des agents des services secrets, aussi bien kenyans qu’américains. Il faut dire que depuis les attentats contre les ambassades américaines de Nairobi et Dar es Salam (Tanzanie) en 1998, le Kenya est l’un des plus proches alliés des Etats-Unis dans sa lutte contre le terrorisme. Un allié sans doute plus fréquentable que ses deux voisins directs, l’Ouganda et l’Ethiopie, auxquels Clinton ne rendra pas visite. De fait, malgré les heurts qui ont suivi l’élection présidentielle de la fin 2007, le pays a connu une alternance démocratique en 2002. En Ouganda, Yoweri Museveni a fait modifier la Constitution et s’accroche au pouvoir depuis 1986, tandis qu’en Ethiopie, Meles Zenawi est seul maître à bord depuis 1991…

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Attendue surtout sur les questions économiques évoquées au cours du huitième forum de l’AGOA (African Growth and Opportunity Act), la secrétaire d’Etat n’a pas manqué de pointer du doigt les atermoiements de la coalition au pouvoir à Nairobi depuis fin février 2008 – et au sein de laquelle cohabitent tant bien que mal des ennemis d’hier, pour certains potentiellement candidats à la présidence en 2012. A savoir le Premier ministre Raila Odinga, le vice-président Kalonzo Musyoka et le vice-Premier ministre Uhuru Kenyatta. Fustigeant la corruption, soulignant la nécessité de réduire les barrières commerciales entre les pays africains, Hillary Clinton a vivement regretté que les responsables des violences de décembre 2007 et janvier 2008 n’aient pas été traduits en justice. « Nous sommes vraiment déçus de constater que les poursuites n’ont pas été menées à leur terme un an et demi après [les violences]. C’est pourquoi nous engageons le Kenya à résoudre ce problème en interne et à mettre en place un tribunal local ». Las, la mise en œuvre d’un tribunal local faisait partie de ces nombreuses réformes attendues par les Kenyans et toujours repoussées par une Coalition hétéroclite, coûteuse et peu efficace.

Accroître les échanges économiques

Il faut dire que son programme est chargé : adoption d’une nouvelle Constitution, réforme foncière, combat contre l’impunité, lutte contre la corruption, chômage des jeunes, pauvreté, inégalités… Et qu’il lui faudrait une vision collective qui manque aujourd’hui cruellement. Même si le président Mwai Kibaki a assuré à la Secrétaire d’Etat que les réformes seraient mises en place « dans les plus brefs délais ».

La veille de l’arrivée de Hillary Clinton, le Premier ministre Raila Odinga avait par avance répondu aux critiques visant le gouvernement kenyan : « Donner des leçons sur les problèmes de gouvernance et de transparence est de mauvais goût. Le continent se remet à peine d’années de dictature et de gestion autoritaire contre lesquels de nombreux pays africains ont combattu rudement. Nous n’avons pas besoin de leçons sur la façon de gouverner… Nous avons besoin de leçons sur la manière de commercer entre nous et avec le reste du monde pour prospérer. »

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Le 5 août, Odinga a récidivé : « Nous avons besoin de partenaires, pas de protecteurs ! ». Les Kenyans, qui n’ont guère confiance en une classe politique qu’ils savent globalement corrompue, apprécieront. Quant aux habitants des pays où l’on tripatouille les Constitutions, ils évalueront sans doute à sa juste mesure la mort affirmée de la « gestion autoritaire ».

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