Ban Ki-moon : pourquoi « l’homme invisible » a été réélu pour un second mandat à l’ONU

Transparent pour certains, carrément passif pour d’autres, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, est surnommé « l’homme invisible » par ses détracteurs. Fort d’un bilan mi-figue, mi-raisin, il a pourtant été réélu à l’unanimité, faute d’autres candidats. Alors, « l’homme invisible » est-il aussi l’homme sans qualités ? Éléments de réponse.

Ban Ki-Moon, secrétaire général des Nations unies. © AFP

Ban Ki-Moon, secrétaire général des Nations unies. © AFP

Publié le 30 juin 2011 Lecture : 3 minutes.

Il a le charisme d’une huître. La boutade colle à la peau de Ban Ki-moon, reconduit le 21 juin à l’unanimité – faute de prétendants – au poste de secrétaire général des Nations unies. Au lendemain de cette réélection, sa première conférence de presse n’augure pas d’un changement de personnalité. S’exprimant dans un anglais basique, le nez penché sur ses notes avant de répondre aux questions, maniant la langue de bois dans la plupart de ses réponses, le Sud-Coréen de 67 ans n’a pas brillé par son brio. Alors qu’une journaliste lui demandait s’il allait être plus hardi au cours de ce second mandat, M. Ban a répondu qu’il ne faisait qu’appliquer une méthode pour parvenir à la paix dans le respect des principes onusiens. Il a par ailleurs montré beaucoup de compassion pour les problèmes de ce monde, qu’il trouve « complexes », et appelé les États membres à respecter les résolutions du Conseil de sécurité…

"Falot et inaudible"

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Un héraut très discret. Pas de rupture de style, donc, pour celui que ses détracteurs surnomment l’« homme invisible », le qualifiant de « falot et inaudible ». On lui a reproché, entre autres, sa passivité et son silence sur la question des droits de l’homme en Chine, au Sri Lanka et en Birmanie, ainsi que d’avoir affaibli le leadership des Nations unies par sa diplomatie discrète.

Piètre orateur, Ban Ki-moon privilégie, en fait, les négociations en coulisse et les tribunes dans la presse écrite plutôt que les déclarations tapageuses pour apaiser les crises. Entouré d’anciens collaborateurs du ministère sud-coréen des Affaires étrangères, il travaille d’arrache-pied, commençant ses journées à l’aube dans sa résidence particulière sur l’East River, à New York. Des efforts qui finissent par porter leurs fruits.

Des succès en Afrique et au Proche-Orient

En Afrique, il a obtenu quelques succès, notamment en Côte d’Ivoire. Son représentant spécial, Choi Young-jin, qui n’est autre que son ancien vice-ministre des Affaires étrangères, a appuyé le gouvernement légitime d’Alassane Ouattara et la communauté internationale pour renverser Laurent Gbagbo. Au Soudan, le secrétaire général a obtenu le déploiement d’une force internationale au Darfour en 2007, et il prévoit d’envoyer prochainement des Casques bleus pour mettre fin aux hostilités dans la région du Kordofan. Cependant, l’ONU reste empêtrée dans le bourbier somalien.

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Au Proche-Orient, difficile de faire le bilan du secrétaire général tant les avancées sont faibles. Il a tout de même obtenu un cessez-le-feu, en janvier 2009, lors de l’opération Plomb durci de l’armée israélienne à Gaza. « Il fait ce qu’il peut en essayant de faire progresser les discussions, explique un diplomate européen impliqué dans le processus de paix. Il doit tenir compte de la volonté de la majorité des États membres qui réclament la création de l’État palestinien et de la position des États-Unis, alliés traditionnels d’Israël et qui disposent d’un droit de veto au Conseil de sécurité. »

Audacieux au moment opportun

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Indignez-vous ! Depuis le déclenchement du « printemps arabe », le secrétaire général a tout de même redoré son blason. Il s’est rangé du côté des manifestants en condamnant, souvent avant le Conseil de sécurité, les actes de répression en Égypte, à Bahreïn, au Yémen, en Libye et en Syrie, tout en essayant de continuer à négocier avec les chefs de ces États pour qu’ils prennent en compte « les aspirations de leur peuple ».

Il a récemment salué les réformes constitutionnelles entreprises par le roi Mohammed VI au Maroc. « Les libertés d’expression, de manifester et de communiquer ont été négligées dans le monde arabe, a-t-il affirmé. C’est la leçon que les dirigeants doivent retenir et c’est ce qu’ils doivent changer… » Une audace que Philippe Bolopion, de Human Rights Watch, interprète comme un revirement positif qui lui permettra de placer son second mandat sous le signe des droits de l’homme.

Ban Ki-moon proposera sa vision du développement des Nations unies lors de l’assemblée générale de septembre. Il a donné quelques priorités dans son discours de remerciement du 21 juin. L’ONU continuera ses efforts au Soudan, en RD Congo, en Côte d’Ivoire, en Somalie, en Irak, au Moyen-Orient, et devra remettre sur la table les questions liées au changement climatique et à la lutte contre la corruption pour obtenir des engagements concrets des États. 

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