Entrée progressive des OGM en Afrique

Encore peu utilisées sur le continent, les cultures génétiquement modifiées font leur entrée en Afrique de l’Ouest.

La nation Arc-en-Ciel produit du coton transgénique depuis 1997. © J.-F. ROLLINGER/J.A.

La nation Arc-en-Ciel produit du coton transgénique depuis 1997. © J.-F. ROLLINGER/J.A.

Publié le 8 octobre 2010 Lecture : 3 minutes.

À la conquête de l’or vert africain
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À la conquête de l’or vert africain

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C’est une révolution. Pour la première fois en Afrique francophone, un pays cultive des OGM à grande échelle. Les producteurs burkinabè ont planté, lors des semis de l’été, quelque 475 000 hectares de coton transgénique, soit 80 % des superficies. « Le coton génétiquement modifié présente de nombreux avantages », explique Tahirou Fofana, vice-président de l’Union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB).

Selon les estimations de la Sofitex, la première compagnie du pays, il permet d’accroître les rendements de 30 % à 40 % et de réduire également de moitié les traitements. Les autorités comptent sur les OGM pour relancer une culture qui est passée de 700 000 tonnes au début des années 2000 à seulement environ 400 000 t en 2009-2010. Objectif : 550 000 t dès cette saison.

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Monsanto au Burkina

Les expériences sur les OGM ont débuté en 2003 au Burkina. Elles sont menées conjointement par la firme américaine Monsanto et l’Institut de l’environnement et de recherches agricoles (Inera). La multinationale apporte son gène et la technique de transgenèse, les Burkinabè fournissent les variétés locales. Cette saison voit l’aboutissement de huit années de recherche. Monsanto a consenti des efforts commerciaux pour gagner un marché rétif. Son objectif : conquérir tous les pays cotonniers de la zone franc, du Sénégal au Tchad.

Car les cultures transgéniques sont encore peu répandues. Leur introduction fait toujours débat, et nombre de responsables politiques africains sont inquiets de la sécurité pour les consommateurs et de l’impact sur l’environnement. Un discours anti-OGM venu de l’Europe décrie un avenir où « l’agriculture serait dictée par des multinationales dont la récolte pourrait menacer la biodiversité complexe de l’Afrique ». Il est vrai qu’en l’état actuel des connaissances des questions restent en suspens, notamment celles relatives à l’impact de l’utilisation d’OGM conjuguée à celle de pesticides sur les sols, les ressources hydriques, la reproduction des insectes.

« Que faisons-nous ? s’interroge Peter Hartmann, le directeur général de l’Institut international d’agriculture tropicale d’Ibadan au Nigeria, qui réalise des expériences en matière de culture transgénique. Nous abandonnons nos recherches ou nous les continuons en attendant que nos législateurs se décident quant à leur utilisation ? »

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Adapter la législation

L’Afrique du Sud est le pays le plus mature sur le continent. Il a commencé la production d’OGM en 1997, pour une superficie cultivée estimée à 2,1 millions d’hectares en 2009. L’Égypte, qui produit du maïs sur 100 ha, et le Burkina sont les deux seuls autres pays en phase d’exploitation. Mais d’autres s’ouvrent. Les législations du Zimbabwe, du Kenya et de Maurice permettent l’introduction de cette culture. Douze autres pays pourraient également entamer des essais sur les cultures transgéniques : Soudan, Madagascar, Ghana, Togo, Nigeria, Mozambique, Zambie, Malawi, Ouganda, Tanzanie, Namibie et Côte d’Ivoire.

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Au final, le continent cultive 2,8 millions d’hectares d’OGM, contre 3,7 en Chine, 8,4 en Inde, 21,4 au Brésil et 64 aux États-Unis. Seulement 12 % des semences (toutes variétés confondues) font l’objet d’une commercialisation en Afrique, contre une moyenne de 50 % dans le monde. Dans la majorité des cas, les sociétés (les géants Monsanto et DuPont sont les plus actifs) doivent développer leurs nouvelles variétés localement et passer des accords de licence avec des opérateurs nationaux.

« Je ne sais pas si les OGM sont les bienvenus sur le continent. C’est un pari à haut risque et coûteux », explique Denise Dewar, directrice de la biotechnologie de la fédération CropLife, rassemblant les grandes sociétés agrochimiques. À court terme, certes. Mais la production agricole mondiale devra augmenter dans les trente prochaines années. Et le Sud nourrira de plus en plus le Nord. Les OGM devraient faire partie de l’équation.

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