Manifester est un droit

Publié le 19 septembre 2010 Lecture : 2 minutes.

Ce mois de septembre a débuté sous de mauvais auspices. Le sang a coulé à Maputo, au Mozambique, où des manifestations contre la vie chère ont été brutalement réprimées. Treize morts, dont deux enfants : c’est le bilan macabre de deux journées au cours desquelles les Mozambicains ont voulu crier leur ras-le-bol de devoir toujours tirer le diable par la queue et de voir ce qui reste de leur pouvoir d’achat laminé par la flambée des prix. Comme toujours, la thèse officielle, par la voie du ministre de l’Intérieur, José Pacheco, a fait dans le registre de la dénégation : « Les forces de l’ordre qui ont tiré sur les manifestants n’avaient pas reçu l’ordre de tirer à balles réelles. »

Et c’était tout. Aucune enquête n’a jusqu’ici été diligentée pour identifier ces agents qui se seraient ainsi rendus coupables d’actes criminels non ordonnés par l’autorité légitime. Les morts de Maputo viennent s’ajouter à la liste déjà longue d’Africains fauchés par des balles pour avoir voulu user d’une liberté démocratique : le droit de manifestation et de cortège

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Au cours du printemps 2008, avec l’éclatement d’émeutes de la faim en Égypte, au Maroc, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Burkina Faso…, la répression qui s’est abattue sur les manifestants a atteint le pic des 40 morts au Cameroun. Touchés au même moment par des événements semblables, l’Indonésie et les Philippines réagissaient par la distribution de riz dans les quartiers pauvres et de subventions à l’huile de cuisson.

L’Afrique reste l’un des rares endroits de la planète où on répond à l’appel au secours de la population par des balles et des matraques. Et pour cause : tout mouvement d’humeur, même le plus banal, est perçu comme une menace au régime, voire une insurrection, et traité comme tel.

Le rapport particulier des dirigeants africains au pouvoir explique leur allergie aiguë à toute forme de contestation. Dressées en chiens de garde du pouvoir, les forces de l’ordre confondent l’ordre avec la terreur.

Il est vrai que les manifestants ne facilitent pas les choses, en dérapant facilement d’une marche pacifique à l’émeute. Sous le couvert de l’exercice d’un droit constitutionnel, nombre d’éléments incontrôlés pillent, cassent et incendient.

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Si ces comportements expliquent pour une part la répression, ils ne sauraient la dédouaner. Des émeutes d’une plus grande violence éclatent dans les pays occidentaux sans donner lieu à des morts. Les graves soulèvements dans les banlieues françaises, en novembre-décembre 2005, ont été contenus sans qu’une seule vie humaine ne soit perdue. Les graves casses et destructions à l’occasion des Jeux olympiques d’hiver à Vancouver, en février 2010, ont été gérées sans qu’une seule balle réelle ne soit tirée.

Les hommes en armes en Afrique doivent être formés au maintien démocratique de l’ordre. Et initiés à certaines idées simples : la vie humaine est sacrée ; on n’use d’une arme mortelle qu’en cas de légitime défense. Si l’État garantit l’ordre, c’est pour permettre l’exercice des libertés…

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