Jack Lang et les pirates

L’ancien ministre français a été chargé par l’ONU de résoudre un vrai casse-tête juridique.

Publié le 14 septembre 2010 Lecture : 2 minutes.

Les temps sont durs pour les pirates. Depuis que la communauté internationale a entrepris de repousser leurs assauts dans le golfe d’Aden en multipliant les patrouilles de navires de guerre, leurs sorties sont moins efficaces – leur taux de réussite est passé de 63 % à 21 % en deux ans. Mais ce relatif succès de la communauté internationale pose un nouveau problème : une fois arrêtés, où incarcérer et juger les assaillants ?

Pas de place dans les prisons

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Pour le Conseil de sécurité de l’ONU, il s’agit de trouver une solution « à long terme » et vite ! Annoncée le 25 août, la nomination de Jack Lang comme conseiller de Ban Ki-moon sur les questions juridiques liées à la piraterie répond à cette volonté. L’ancien ministre français de la Culture devra, selon l’ONU, « lever les obstacles administratifs auxquels se heurtent les États dans ce domaine ». Lang devra étudier les pistes envisagées dans un rapport remis le 25 août par Ban Ki-moon aux membres du Conseil de sécurité. Elles sont au nombre de sept et vont du soutien aux tribunaux déjà existants à la création d’un tribunal international, en passant par la mise sur pied d’un tribunal somalien siégeant en Somalie ou chez l’un de ses voisins. Mais l’option la plus réaliste, défendue par le secrétaire général des Nations unies, consisterait à renforcer le mécanisme actuel.

La tâche n’est pas mince. La Somalie n’est pas capable d’accueillir tous les prisonniers. Selon le site bruxelles2.eu, spécialisé dans la politique de l’Union européenne en matière de défense, les deux provinces du Puntland et du Somaliland ont condamné, en 2009, plus de 180 pirates. Mais elles peuvent difficilement faire plus.

Les États occidentaux s’occupent parfois de ceux qu’ils ont arraisonnés en mer, mais cela reste rare. Quant aux voisins de la Somalie, ils rechignent à les juger et avancent de bonnes raisons : pas assez de place dans les prisons, une justice engorgée, le risque de voir ces hommes se retrouver en liberté sur leur territoire…

Pour l’heure, seuls le Kenya et les Seychelles ont accepté d’« accueillir » des pirates. Le Kenya, où l’engagement de l’UNODC (l’agence des Nations unies chargée de la lutte contre la drogue et le crime) est le plus fort, en détient aujourd’hui 123. Un tribunal spécial a été inauguré en juin, à Mombasa, et doit les juger dans les dix-huit mois. Mais les autorités kényanes ont menacé de ne plus accepter de nouveaux pirates si les 2,3 millions de dollars promis par l’ONU n’étaient pas versés.

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Le problème est plus sensible encore aux Seychelles, où, pour 1,1 million de dollars, la communauté internationale finance l’extension de la prison. Mais les 31 prisonniers somaliens représentent 10 % de la population carcérale, et l’archipel n’a guère envie de (re)devenir un repaire de pirates… La Tanzanie et Maurice se sont portés candidats, mais cela implique de nombreux chantiers (prisons aux normes, adoption d’une loi antipirates…). Donc du temps et de l’argent.

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