Nacéra Dutour : mère courage
Nacéra Dutour, fondatrice du Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA). © JA
Publié le 24 juin 2010 Lecture : 1 minute.
Depuis août 1998, tous les mercredis matin, les familles de disparus tiennent un sit-in devant le siège de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l’homme (CNCPPDH, structure officielle présidée par l’avocat Farouk Ksentini). Qu’il vente ou qu’il pleuve, des dizaines de femmes brandissant le portrait de leur fils, époux ou frère disparus après avoir été enlevés par les forces de l’ordre, manifestent pour que nul n’oublie. Cette mobilisation permanente est l’oeuvre de Nacéra Dutour, mère de disparu. Son engagement a débuté en mai 1998, à Paris, quand elle crée le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA). Trois mois plus tard, le CFDA organise le premier rassemblement des familles de disparus, devenu depuis hebdomadaire.
Nacéra Dutour parvient à ouvrir, en septembre 2001, à Alger, un bureau du CFDA sous le nom de SOS Disparus. Objectif : structurer le mouvement de manière à fournir aux femmes une assistance administrative, judiciaire et psychologique. SOS disparus recueille les témoignages, constitue une base de données pour la préservation de la mémoire sur les disparitions forcées. Soit l’exact contraire de la politique de Réconciliation nationale, où prime la paix plutôt que la justice, adoptée à une écrasante majorité par voie référendaire en septembre 2005. Mais Nacéra Dutour n’en a pas pour autant désarmé et maintient la pression sur le pouvoir, publie une lettre d’information trimestrielle, organise des séminaires et des caravanes contre l’oubli. Menaces anonymes, filatures policières, intimidations visant les propriétaires qui louent les locaux à SOS Disparus, rien n’y fait ; Nacéra Dutour ne veut en aucun cas renoncer à son statut de mauvaise conscience de la Réconciliation nationale.
