Tchad : quand le malheur des uns fait le bonheur des autres
Le pays mise sur l’essor du tourisme. La crise sécuritaire dans les autres régions du Sahel peut l’y aider… À moins qu’elle ne ruine ses efforts.
Si le Cameroun éternue, le Tchad s’enrhume. La prise en otage de sept Français, dont quatre enfants, le 19 février dans le nord du Cameroun risque en tout cas de gripper les projets touristiques de N’Djamena. Un risque connu : si, depuis deux ans, le Tchad a décidé de miser sur le tourisme pour en faire le deuxième secteur pourvoyeur de devises (après les hydrocarbures), c’est aussi parce que les autres pays de la bande sahélo-saharienne sont devenus infréquentables. « Le terrorisme et le fanatisme nous privent de destinations magnifiques telles que le Niger, la Mauritanie ou le Mali ; c’est une chance que le Tchad soit encore fréquentable », se réjouit Yves, un vieux baroudeur du Sahel, qui a fait partie de la première expédition de Point-Afrique en février 2012.
Luxe
Fort de ce report d’affection, le pays, qui a accueilli à peine plus de 62 400 visiteurs entre 2006 et 2008, espère en recevoir 500 000 d’ici à 2020. Pour y parvenir, le ministère du Tourisme estime qu’il faut injecter dans le secteur entre 637,5 et 1 275 milliards de F CFA (entre 971 millions d’euros et 1,9 milliard d’euros), augmenter le parc hôtelier et former 7 000 à 10 000 jeunes.
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Mais en attendant, le Tchad reste un nain touristique. Point-Afrique est le seul voyagiste à s’y intéresser. Pour en faire une destination prisée, il faut plus de dessertes, explique Célérique Ribeaucourt, la directrice d’Acabao. Pour le moment, cette agence de voyages spécialiste de l’Afrique a suspendu ses activités au Mali, en Mauritanie, au Niger et dans le Sahara algérien – et, « grâce à la série de vols exceptionnels mis en place par Point-Afrique », elle propose le Tchad.
Autre handicap du pays : son image, écornée par des années de conflits et de rébellions. « La guerre est finie, mais le pays continue à faire peur. Si la situation au Mali s’enlise, le Tchad risque d’en pâtir. Les touristes feront des amalgames, même si les deux États ne sont pas voisins », prévient Mustapha Hiane, responsable Sahara chez Nomade Aventure.
Enfin, le Tchad n’est pas à la portée de tous. Seule une poignée de voyageurs, à la fois inconditionnels du Sahara, aisés et disposant de temps, s’y rendent. « Le Tchad ne se visite pas en une semaine, il faut compter une quinzaine de jours au minimum, et être prêt à débourser au moins 2 500 euros », souligne Laurent Boiveau, guide touristique spécialiste du pays. Un luxe hors de portée du commun des touristes qui se rendaient dans les autres États sahéliens où, pour moins de 1 000 euros, ils pouvaient s’offrir un tour dans le désert. Selon Christine Coumet, chef de produit Afrique chez La Balaguère (randonnées et voyages à pied), ces petits budgets se sont rabattus sur le sud de l’Espagne, le Portugal ou les pays d’Europe orientale. Même les provinces sahariennes du Maroc sont délaissées. Fort de sa bonne réputation, sa stabilité politique et ses liaisons aériennes développées, un pays africain tire malgré tout son épingle du jeu : le Cap-Vert.
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