Terrorisme en Tunisie : comme une pieuvre étend ses tentacules…

Après Aqmi ou Ansar al-Charia, c’est au tour de Daesh, implanté dans la Libye voisine, de menacer la Tunisie.

Des mililtants d’Ansar al-Chariah, en septembre 2012, à Benghazi. © AP/SIPA

Des mililtants d’Ansar al-Chariah, en septembre 2012, à Benghazi. © AP/SIPA

ProfilAuteur_SamyGhorbal

Publié le 25 mars 2015 Lecture : 2 minutes.

Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Ansar al-Charia, branche libyenne de l’État islamique (EI, ou Daesh)… La Tunisie fait face depuis trois ans à une menace polymorphe et grandissante. Les autorités, qui redoutaient une action d’envergure, avaient jusqu’à présent réussi à déjouer les tentatives d’attentat, notamment pendant les élections, entre octobre et décembre 2014.

L’attaque du Bardo, perpétrée par au moins trois assaillants, dont deux ont été tués par les policiers d’élite de la Brigade antiterroriste, est très probablement imputable à l’EI. L’un des deux terroristes abattus, Saber Khachnaoui, natif de Kasserine, dont la famille était sans nouvelles depuis trois mois, aurait combattu dans les rangs de la branche libyenne de Daesh avant de regagner la Tunisie. Une revendication sonore rendant hommage aux deux "martyrs" a été postée sur un compte Twitter proche de l’EI le lendemain des faits.

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Le déroulement et le mode opératoire choisi tendent d’ailleurs à accréditer la piste EI, et non celle d’Aqmi. Active dans les maquis de l’ouest du pays (mont Chaambi), la katiba (brigade) Oqba Ibn Nafaa, affiliée à Al-Qaïda, ne s’en prend habituellement qu’aux policiers et aux militaires. Elle est dirigée par l’insaisissable émir algérien Loqman Abou Sakhr. Selon des sources sécuritaires, elle ne compterait pas plus d’une centaine de combattants, très aguerris cependant, qui se renouvellent en permanence en s’appuyant sur les cellules dormantes d’Ansar al-Charia. Leur combat, qui visait initialement à faire la jonction avec les maquis algériens, semble perdu.

À l’inverse, l’activisme sanglant de l’EI suscite toujours plus de vocations. Plus de 3 000 Tunisiens ont pris la direction de la Syrie depuis 2012 pour y accomplir le jihad, et beaucoup d’entre eux auraient maintenant prêté allégeance à l’EI. Avec les Saoudiens, les Tunisiens forment le contingent étranger le plus représenté en Syrie.

Entre 1000 et 1500 jihadistes se revendiquant de l’EI en Libye

L’EI est aussi désormais en plein essor en Libye. Le nombre total des jihadistes qui lui sont affiliés varie entre 1 000 et 1 500, selon les estimations les plus fiables, répartis entre Syrte, Benghazi et Derna. Le groupe terroriste compte dans ses rangs nombre d’anciens partisans tunisiens d’Ansar al-­Charia. Beaucoup de militants se sont réfugiés en Libye, à la mi-2013, après que leur organisation eut été déclarée illégale. Leur chef, Abou Iyadh, un vétéran d’Afghanistan et de Bosnie, s’est volatilisé. Localisé – à tort – à Derna, dans l’ouest de la Libye, il se trouverait plus probablement dans le sud du pays, qui sert de sanctuaire à la branche sahélienne d’Aqmi.

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Depuis plusieurs mois, la Libye a été déclarée terre de jihad par une série de fatwas de cheikhs salafistes, qui recommandent maintenant aux Tunisiens de s’y installer au lieu d’aller combattre en Syrie et en Irak. Ces fatwas ont reçu la "bénédiction" d’Abou Bakr al-Baghdadi, le "calife" de l’EI.

"L’EI est entré dans une phase d’expansion territoriale, avec la Libye en point de mire, pour ouvrir un second front", explique le journaliste David Thomson, spécialiste de la mouvance jihadiste tunisienne. Aujourd’hui, on redoute que l’organisation choisisse de porter le combat en Tunisie, en profitant de la porosité de la frontière, dans une sorte de duplication du schéma irako-syrien. Le cauchemar absolu…

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