Haro sur le culte de la personnalité

L’Afrique a-t-elle rompu avec la glorification publicitaire de ses dirigeants ? La ministre ghanéenne des transports a démissionné pour une affaire de bus peints à l’effigie de son président…

L’oeil de Glez : Dzifa Attivor ou le culte de la personnalité mal placé © Damien Glez

L’oeil de Glez : Dzifa Attivor ou le culte de la personnalité mal placé © Damien Glez

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Publié le 29 décembre 2015 Lecture : 2 minutes.

Que le politicien africain qui n’a jamais caressé dans le sens du poil la mégalomanie présidentielle jette la première pierre à Dzifa Attivor, ministre ghanéenne des Transports démissionnaire.

Elle, c’est un pavé qu’elle a jeté dans la mare d’organisations de la société civile désormais agacées par le culte de la personnalité des dirigeants du continent. Que madame Attivor entreprenne l’achat de 116 bus en vue d’améliorer la circulation dans les grandes villes du Ghana, quoi de plus normal pour un membre du gouvernement en charge des transports. Qu’elle envisage, avec la société Smarttys Productions, un contrat de publicité pour rentabiliser le potentiel communicationnel de la carrosserie desdits cars, pourquoi pas ? Que ces supports publicitaires ambulants arborent les couleurs nationales et les portraits d’anciens dirigeants ghanéens, passe encore, même pour une somme qui pourrait avoisiner plusieurs millions de cedis. Mais la polémique s’enflamma lorsque la groupie Attivor décida de placarder, sur une partie des bus, la photo de l’actuel locataire de la présidence, John Dramani Mahama.

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Instantanément, l’opposition et les associations anti-corruption réclamèrent une enquête indépendante sur ces dépenses exorbitantes, jugées d’autant plus inappropriées qu’elles promouvaient l’image d’un président qui devrait être en campagne électorale au cours de l’année 2016.

Tout flatteur chutant au dépit de celui qui ne l’écoute pas, un communiqué du cabinet de la présidence ghanéenne annonçait, quelques heures avant Noël, la démission de la ministre des Transports…

Comme le merchandising de Star Wars, l’histoire est parsemée de produits dérivés voués à l’imagerie présidentielle

L’Afrique serait-elle en train de rompre avec un zèle laudateur qui n’a d’égal que la mégalomanie des courtisés ? Comme le merchandising de la saga Star Wars, l’histoire plus ou moins récente du continent est parsemée de produits dérivés voués à l’imagerie présidentielle.

Qui a oublié les pagnes représentant les 785 000 perles du manteau de l’empereur centrafricain Bokassa Ier ? Plus récemment, qui n’a pas entendu parler de l’encart publicitaire « Bienvenue en France au président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi » acheté, en 2014, dans le quotidien français Le Figaro ? C’est le genre de louanges graphiques qui mettaient mal à l’aise l’un des rares dirigeants africains qu’on ne pouvait taxer d’arrogance : Nelson Mandela. L’ancien président sud-africain circonscrivait autant que possible la frénésie marchande qui le faisait figurer sur des casquettes, des fanions, des bracelets de luxe et autres tabliers de cuisine.

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« Plus rien ne sera plus comme avant », entend-on à l’orée de la nouvelle année, notamment au cœur d’une population qui a fait chuter un président dont les 27 ans de pouvoir avait encouragé la plus caricaturale des folies des grandeurs. Jetés aux orties les pagnes à l’effigie de Blaise Compaoré ? Alors que le nouveau président burkinabè prêtait serment, ce mardi, un enfant s’arrêtait, dans la rue, devant une affiche géante. Devant le panneau qui déroulait le message « Roch Marc Christian Kaboré président du Faso, le Burkina est fier », l’enfant déclarait : « Si on les laisse faire, ils vont faire des pagnes avec la tête de Roch ». La vérité sort de la bouche des enfants…

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