« Murmures à la jeunesse » : Christiane Taubira en cinq mots

À peine a-t-elle démissionné du gouvernement français que l’ancienne ministre de la Justice, Christiane Taubira, signe un essai intitulé « Murmures à la jeunesse ».

Christiane Taubira, à l’Élysée, le 23 décembre 2015. © Michel Euler/AP/SIPA

Christiane Taubira, à l’Élysée, le 23 décembre 2015. © Michel Euler/AP/SIPA

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 2 février 2016 Lecture : 2 minutes.

On reproche souvent aux responsables politiques français leur manque de vision, de culture voire l’absence de ce lyrisme propre à susciter l’enthousiasme et l’adhésion populaire. Force est de constater, encore une fois, que Christiane Taubira sort incontestablement du lot. Avec Murmures à la jeunesse (ed. Philippe Rey), un essai paru quelques jours après sa démission du gouvernement motivée par son désaveu de l’inscription de la déchéance de nationalité dans la Constitution (voulue par François Hollande), l’ancienne ministre de la Justice se paie le luxe d’agrandir considérablement sa porte de sortie… vers un avenir politique qu’on imagine fécond de longues années encore.

Tyranneaux

Manuel Valls et Christiane Taubira après les attentats de Paris. © Eric Feferberg/AP/SIPA

Manuel Valls et Christiane Taubira après les attentats de Paris. © Eric Feferberg/AP/SIPA

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Manuel Valls avait déclaré le 9 janvier lors d’un hommage aux victimes de l’attentat de l’Hyper Cacher à Paris : « Expliquer le jihadisme, c’est déjà vouloir un peu excuser. » La réponse de Christiane Taubira n’est pas tendre : « Oui il faut comprendre pour anticiper et ramener du sens au monde. Que les cris des tyranneaux de la pensée cessent de tétaniser nos esprits. (…) Et quelles que soient les clameurs affolées ou hypocrites qu’elle soulève, cette décision d’explorer, de comprendre et de vaincre est inébranlable. »

Daesh

Lors de la cérémonie en hommage des victimes des attentats de Paris aux Invalides. © Francois Mori/AP/SIPA

Lors de la cérémonie en hommage des victimes des attentats de Paris aux Invalides. © Francois Mori/AP/SIPA

« Il… Comment le qualifier ? Comment le nommer ? S’agit-il de reprendre le nom qu’il se donne, lui reconnaissant ainsi un pouvoir de haute portée symbolique ? Et subsidiairement une autorité sur ceux qu’il enrégimente ? », pour l’ex-garde des Sceaux, le débat est « embarrassant » car il comporte le risque d’ « entériner un hold-up sémantique ».

Binationaux

Si Christiane Taubira a quitté le gouvernement français, c’est bien en raison de la volonté du président de la République d’inscrire la déchéance de nationalité pour les terroristes binationaux dans la Constitution. Elle consacre d’ailleurs une vingtaine de pages à la question dans ce réquisitoire qui en fait 94.

Ils ne meurent ni Français ni binationaux, ils meurent en morceaux

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« La déchéance de nationalité. Déchoir les terroristes, qui songerait à s’y opposer ? Binationaux ou non ! Mais quel effet sur les mêmes ? Ils ne meurent ni Français ni binationaux, ils meurent en morceaux. D’ailleurs, étaient-ils binationaux, les neuf qui ont semé la mort et la désolation dans Paris, le soir du 13 novembre ? Par contre ils en ont tué des binationaux : vingt-sept ! Trois fois plus qu’eux. Ne s’excluent-ils pas de fait de la communauté nationale ? »

Identité

Christiane Taubira quitte le ministère de la justice après avoir démissionné. © Jacques Brinon/AP/SIPA

Christiane Taubira quitte le ministère de la justice après avoir démissionné. © Jacques Brinon/AP/SIPA

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« Faute de fabriquer une appartenance plausible et accueillante, la République laisse du champ à l’endoctrinement par les marionnettes sans scrupules qui, bafouant toute probité, parviennent à berner les esprits désemparés en assénant : ‘Vous ne serez plus jamais algériens, marocains, tunisiens, maliens, sénégalais, et vous ne serez jamais français. Soyez musulmans, c’est votre seule identité stable et légitime’. »

Outremers

Christiane Taubira en 2009, alors député de Guyane, lors d’une manifestation. © JACQUES BRINON/AP/SIPA

Christiane Taubira en 2009, alors député de Guyane, lors d’une manifestation. © JACQUES BRINON/AP/SIPA

Pour parler des Outremers Christiane Taubira cite, entre autres, Édouard Glissant ou encore Frantz Fanon : « (…) En réceptacles de toutes les misères, de toutes les souffrances, de toutes les désespérances, de tous les rêves, de tous les projets, (…) les Outremers enseignent la diversité du monde, la vigilance à l’autre car, comme le disait Frantz Fanon aux Algériens et aux Antillais dans les années 60, ‘quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille, on parle de vous’. »

Murmures à la jeunesse, de Christiane Taubira, éditions Philippe Rey, 94 p., février 2016, 7 euros.

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