Le 4 août 1984, Thomas Sankara rebaptisait la Haute-Volta en Burkina Faso

Il y a quarante ans, Thomas Sankara renommait l’ancienne Haute-Volta en Burkina-Faso, le Pays des hommes intègres. Un changement de nom officiel et très symbolique, destiné à rompre avec le passé colonial et à concrétiser les objectifs de la révolution sankariste.

Thomas Sankara, ex-président du Burkina Faso, le 7 février 1986 à Paris. © Pascal George/AFP

Thomas Sankara, ex-président du Burkina Faso, le 7 février 1986 à Paris. © Pascal George/AFP

BENJAMIN-ROGER-2024

Publié le 4 août 2021 Lecture : 2 minutes.

Cet article a initialement été publié en juillet 2014.

En vertu d’une ordonnance du 2 août 1984, le capitaine Thomas Sankara, désireux de faire table rase du « passé réactionnaire et néocolonial », rebaptise la Haute-Volta en République démocratique et populaire du Bourkina Fâso (orthographe originelle). Le premier mot signifie « homme intègre » en langue mooré et le second « terre natale » en dioula, soit « le pays des hommes intègres ». Ses sept millions d’habitants ne sont plus des Voltaïques mais des Bourkinabè.

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Le drapeau de l’ancienne Haute-Volta, composé de trois bandes noire, blanche et rouge, est aussi remplacé. Le nouvel étendard national est désormais composé de deux bandes horizontales rouge et verte, frappées d’une étoile jaune à cinq branches. Le tout représentant respectivement les idéaux de révolution, de travail de la terre, et d’espérance.

Autre transformation : l’hymne national. La chanson Volta laisse la place au Ditanie, ou « chant de la victoire ». La devise nationale est elle aussi modifiée, passant de « Unité-travail-justice » à « La patrie ou la mort, nous vaincrons ».

Sankara à la guitare

Ce changement de nom de l’ancienne colonie française est célébré deux jours plus tard, le 4 août, jour du premier anniversaire de la révolution de Thomas Sankara. Ce jour-là, le Conseil national révolutionnaire (CNR) organise des festivités dans tout le pays en l’honneur du nouveau Bourkina Fâso. Outre les cérémonies officielles, des matchs de football et de boxe, ainsi qu’une course cycliste, sont organisés.

À Ouagadougou, les festivités sont menées par le capitaine Sankara en personne. Le jeune leader de 36 ans, qui a pris le pouvoir avec un groupe d’officiers un an plus tôt, jubile. Au petit matin du 4 août, après une nuit de fête avec une vingtaine de proches dans son quartier général, il attrape une guitare dont il commence à gratter les cordes. Un de ses ministres et un sergent-chef lui emboîtent le pas. Le petit groupe tire l’assemblée de sa somnolence.

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Parmi les convives, un invité de marque : le président ghanéen John Jerry Rawlings, dont les grandes lunettes sombres ne masquent pas l’étonnement face aux talents cachés de son hôte. Comme l’écrit Mohamed Selhami, alors envoyé spécial de Jeune Afrique, « la révolution n’est pas seulement cette chose qui immobilise l’esprit, elle sait aussi l’égayer, surtout lorsque Thomas Sankara s’en occupe ».

« Effacer les traces du colonialisme »

Muni de son inséparable revolver incrusté d’argent et d’ivoire, le capitaine anti-impérialiste expliquera à notre ancien collaborateur avoir changé le nom de son pays « pour mieux appliquer notre conception révolutionnaire ». Selon lui, « il fallait prendre des initiatives audacieuses et radicales, entre autres effacer les traces du colonialisme. À commencer par l’appellation donnée par celui-ci à notre pays. Le nom Haute-Volta ne répondait ni à des critères géographiques ni à des critères sociologiques ou culturels ».

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Quarante ans plus tard, le Burkina Faso reste connu dans le monde entier comme le « Pays des hommes intègres ». Le capitaine Thomas Sankara, assassiné le 15 octobre 1987 dans des circonstances troubles, est lui devenu une légende, adulé bien au delà des frontières de l’ancien berceau de la révolution sankariste.

Lire l’article de Mohamed Selhami, paru dans le Jeune Afrique n°1232-1233, paru entre le 15 et le 22 août 1984 :

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