Mauritanie : santé de fer ou petite mine ?

La Société nationale industrielle et minière (Snim) voit grand. Mais la chute de 40 % des cours du minerai pourrait la contraindre à revoir ses ambitions à la baisse.

L’industrie minière représente 95 % des recettes de l’État mauritanien et 30 % du PIB. © Snim

L’industrie minière représente 95 % des recettes de l’État mauritanien et 30 % du PIB. © Snim

ProfilAuteur_ChristopheLeBec

Publié le 26 novembre 2014 Lecture : 3 minutes.

Mohamed Ould Abdelaziz a bien des atouts en main pour atteindre ses objectifs. © Michał Huniewicz/flickr
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Mauritanie, cinq ans pour tout changer

Réélu en juin 2014 pour un dernier mandat, Mohamed Ould Abdelaziz a bien des atouts en mains pour atteindre ses objectifs. Même si plusieurs inconnues subsistent, à commencer par la menace terroriste ou la mise en place du dialogue avec l’opposition.

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L’année 2013 aura été bonne pour la Société nationale industrielle et minière (Snim). Premier producteur de fer du continent, le groupe public en a exporté 13 millions de tonnes en 2013, soit 4 % de plus qu’en 2012. Quant à ses revenus, portés alors par un cours du fer soutenu, ils ont atteint 1,25 milliard de dollars (908 millions d’euros) l’an dernier, soit 8 % de plus qu’en 2012.

Forte de cette progression, la direction de la Snim, sous la houlette de Mohamed Abdellahi Ould Oudaa, a présenté début 2014 son plan Nouhoudh (« transformation », en arabe), visant une production de 40 millions de tonnes en 2025. Pour y parvenir, le groupe veut d’abord renforcer ses infrastructures logistiques, en particulier la voie ferrée reliant Zouerate à Nouadhibou et son port minéralier. Il veut également relancer l’exploration et développer son projet Guelb II, en construisant et en équipant une seconde usine d’enrichissement des minerais sur ce site.

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Dans le cadre de ce programme de développement et au-delà de sa propre montée en puissance, la Snim compte renforcer ses partenariats avec des groupes internationaux. En juin, la société a d’ailleurs signé un accord commercial de transport de minerai pour une durée de dix-huit ans avec Glencore, l’exploitant de la future mine d’Askaf, dans la région de Fdérick (Nord-Ouest), qui, à pleine capacité, devrait produire environ 7,5 millions de tonnes de fer par an.

La signature de ce partenariat avec le géant suisse des matières premières a mis fin à une période d’incertitude quant à l’avenir de ses projets dans le pays. Glencore avait en effet mis plus de six mois à réévaluer ses actifs miniers mauritaniens (hérités de sa fusion avec Xstrata) et repenser le modèle économique d’Askaf, ainsi que l’intérêt de ses autres permis miniers d’El Aouj (proche d’Askaf) et de Leibthenia (à 50 km de Nouadhibou), encore en phase d’étude de faisabilité.

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« Avec la signature de cet accord commercial, le projet d’Askaf est relancé », se félicite l’avocat Thierry Lauriol, du cabinet Jeantet, proche du dossier. « La question, cruciale, de l’accès à l’eau pour développer les projets dans cette région désertique a elle aussi été réglée entre les deux partenaires », précise cet avocat français, fin connaisseur du pays, qui concède qu’aucune date d’entrée en production n’a encore été annoncée.

Morose

Pourtant, la chute des cours du fer (- 40 % depuis le début de l’année) pourrait remettre en cause le triplement de la production prévu par la Snim et les calendriers des différents projets des opérateurs internationaux. La compagnie publique n’a d’ailleurs pas connu d’augmentation majeure de sa production au premier semestre 2014 (6,7 millions de tonnes extraites). Un étalement du plan Nouhoudh pourrait s’imposer.

La direction de la Snim, qui semble en pleine réflexion sur le sujet, ne souhaite pas s’exprimer sur l’impact de cette chute sur sa stratégie. Sa production annuelle pourrait plafonner à son niveau actuel, autour de 13 millions de tonnes, pendant trois ou quatre ans, jusqu’à ce que les cours du minerai remontent. Les partenaires de la Snim, Glencore, mais aussi le chinois Minmetals, le saoudien Sabic et le canadien Kinross, ont d’ores et déjà ralenti le rythme de développement de leurs projets.

« Le pays, qui dispose d’un code minier très attractif et peu contraignant, car non soumis à un droit régional ouest-africain ou maghrébin, devrait garder la confiance des investisseurs qui y sont déjà implantés. Mais si elle veut en attirer de nouveaux, dans ce contexte morose, la Snim, qui reste le partenaire local incontournable, aurait intérêt à être transparente sur ses ajustements stratégiques liés à la chute des prix, et notamment sur la mise à niveau de ses infrastructures logistiques », estime Thierry Lauriol.

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