Sénégal : Salif Sadio, chef d’une branche du MFDC, menace de rompre la trêve en Casamance

L’un des principaux chefs rebelles de Casamance, Salif Sadio, a averti que les opérations militaires lancées depuis le massacre de 14 hommes partis chercher du bois en forêt pourraient « remettre en cause » la trêve, voire le processus de paix dans cette région du sud du Sénégal.

Des soldats sénégalais lors d’un exercice avec des militaires américains, en juin 2014 (image d’illustration). © Creative Commons / Flickr / US army Africa

Des soldats sénégalais lors d’un exercice avec des militaires américains, en juin 2014 (image d’illustration). © Creative Commons / Flickr / US army Africa

Publié le 24 janvier 2018 Lecture : 3 minutes.

« La tuerie n’a été qu’un prétexte qui a servi à l’armée sénégalaise pour déclencher des opérations militaires en Casamance », a déclaré Salif Sadio dans un entretien avec l’AFP et une radio locale mardi.

Dans une forêt proche de la frontière gambienne, le chef rebelle, assis à une table dressée dans une clairière et entouré d’une cinquantaine d’hommes lourdement armés estime que le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), qui mène depuis 1982 une rébellion indépendantiste, observe « depuis trois ans une trêve unilatérale ».

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Après des années d’accalmie, la Casamance a connu un regain de violence à la suite du massacre de sang-froid, le 6 janvier, de 14 hommes partis chercher du bois dans la forêt protégée de Bayotte, proche de Ziguinchor.

Depuis, l’armée a multiplié les opérations de ratissage et effectué une trentaine d’arrestations. Au moins un « homme armé » puis un « rebelle » présumé ont été tués par des militaires, le 14 puis le 20 janvier, selon des sources militaires, les premiers accrochages mortels avec l’armée signalés depuis plusieurs années.

« Si les opérations se poursuivent, nous serons obligés de rompre la trêve et cela peut mettre en cause tout le processus de paix », a-t-il ajouté, en référence à la reprise des négociations en octobre 2017 à Rome sous l’égide de la communauté catholique de Sant’Egidio.

« Le MFDC que je dirige n’est pas impliqué dans cette tuerie »

Seize personnes, dont un journaliste local, ont été inculpées le 19 janvier d’association de malfaiteurs, assassinat, participation à un mouvement insurrectionnel et détention d’armes sans autorisation.

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Huit autres personnes ont été arrêtées et inculpées ces derniers jours, a indiqué mercredi une source proche du dossier, sans autre indication, portant à 24 le nombre d’inculpations dans cette affaire, selon un décompte de l’AFP.

Selon le journal sénégalais Sud Quotidien, il s’agit de sept habitants du village de Toubacouta, où avaient déjà eu lieu les premières arrestations le 14 janvier, et d’un homme présenté comme un « chargé de mission » du MFDC.

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« Le MFDC que je dirige n’est pas impliqué dans cette tuerie », a répété le chef rebelle, reconnaissant que ses hommes ont par le passé « tabassé des coupeurs de bois » précieux et « même brûlé des camions », mais « jamais tué ».

Salif Sadio a mis en cause l’armée, estimant qu’elle est « bien informée » des trafics de bois et que certains militaires « coupent » et « détruisent » eux-mêmes la forêt casamançaise, en principe protégée.

« L’armée arrête des civils innocents »

Selon lui, les rebelles n’autorisent les villageois qu’à « couper de manière rationnelle des arbres pour faire des portes et fenêtres ou des toitures dans des écoles, dispensaires et mosquées ».

« L’armée arrête des civils innocents qu’elle accuse d’être des acteurs de la tuerie. C’est à nouveau une violation flagrante des accords de Rome. J’exige leur libération immédiate et sans condition », a-t-il conclu, avant de repartir à bord d’un pick-up.

Le gouvernement sénégalais a adopté mercredi le projet de loi portant révision du Code forestier, selon le communiqué du Conseil des ministres. Le président Macky Sall a ordonné la semaine dernière la suspension de toutes les autorisations de coupe de bois en Casamance.

Dans son message de fin d’année, il avait exhorté la rébellion à faire « le pas décisif vers la paix définitive, une paix sans vainqueur ni vaincu », et deux membres du MFDC avaient été libérés le 1er janvier.

Au lendemain de la tuerie, le MFDC avait réaffirmé son engagement au dialogue, assurant qu’il ne se laisserait « pas distraire ni désorienter par les fossoyeurs de la paix ».

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