Carlos Lopes : « Les matières premières ne sont plus le principal moteur de la croissance africaine »

Selon le Bissau-Guinéen, le continent devrait résister à la baisse des cours. Notamment en définissant de nouvelles stratégies à court et moyen terme.

Carlos Lopes est le secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) . © Eric Larrayadieu pour Jeune Afrique

Carlos Lopes est le secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) . © Eric Larrayadieu pour Jeune Afrique

OLIVIER-CASLIN_2024

Publié le 3 novembre 2014 Lecture : 2 minutes.

Propos recueillis à Marrakech par Olivier Caslin

Jeune Afrique : Peut-on dire que l’Afrique va entrer dans une période de ralentissement, dans la foulée de la baisse des cours des matières premières ?

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Carlos Lopes : Toutes les projections indiquent le contraire. D’abord parce que cette croissance est liée à un certain nombre d’éléments structurels qui vont au-delà du prix des matières premières. Ces éléments représentent des tendances lourdes, que ce soit la progression démographique, l’expansion de la classe moyenne – responsable pour les deux tiers de la croissance du continent -, ou les possibilités réelles d’industrialisation.

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Ensuite, si nous regardons la distribution de la croissance à travers l’Afrique, des pays dépourvus de matières premières comme le Rwanda, l’Éthiopie ou le Cap-Vert s’en sortent très bien.

On fait beaucoup de bruit à chaque fois qu’un pays découvre du pétrole, on parle beaucoup du Mozambique et de la Tanzanie, mais l’arrivée du gaz de schiste et la diminution relativement importante de la demande américaine, qui représentait il y a encore quelques années plus de 25 % des exportations africaines de pétrole, montrent que l’horizon s’obscurcit pour ce dernier et pour le gaz.

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Les autres matières premières, minières et agricoles, connaissent en revanche une forte demande.

Vous avez mentionné la baisse de la demande américaine. Faut-il s’inquiéter pour les producteurs africains ?

Il faut qu’ils développent de nouvelles stratégies. L’une à court terme, l’autre à moyen terme. Dans le premier cas, il faut trouver de nouveaux clients très rapidement. L’Angola, par exemple, a déjà préparé l’après-États-Unis. Il a diminué chaque année de 4 % à 5 % les volumes exportés vers ces derniers.

L’Angola s’est déjà préparé à l’après-États-Unis.

En quelques années, la demande américaine est ainsi passée à moins de 20 % des exportations angolaises de pétrole. Dans cinq ans, elle ne devrait pas dépasser les 5 %.

Les Angolais ont cherché de nouveaux débouchés pour leur brut, en Chine pour commencer évidemment. Mais ils continuent à diversifier leur portefeuille pour ne pas trop dépendre d’elle.

À plus long terme, iIs ont décidé de réaliser d’importants investissements dans le raffinage, pour le marché africain cette fois. Quant au Nigeria, il dispose d’énormes possibilités sur ses marchés domestique et sous-régional.

Les économies africaines sont-elles moins dépendantes des matières premières que par le passé ?

Elles le sont encore trop. Les matières premières représentent toujours 80 % des exportations du continent. Elles restent une source de revenus facile pour les États, cela crée une certaine paresse, notamment dans la recherche de nouvelles formes de fiscalité. Et les pays ayant une véritable volonté de réforme sont encore peu nombreux aujourd’hui.

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