Indice Mo Ibrahim 2018 : une Afrique à deux visages

L’Indice Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG) pour l’année 2018 a été rendu public ce 29 octobre. La fondation, qui consacre un trio de tête composé de l’Île Maurice, des Seychelles et du Cap Vert, pointe une tendance à l’amélioration de la gouvernance, mais souligne l’irrégularité de ces progrès.

Mo Ibrahim, le milliardaire anglo-soudanais © Vincent Fournier/JA

Mo Ibrahim, le milliardaire anglo-soudanais © Vincent Fournier/JA

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Publié le 29 octobre 2018 Lecture : 5 minutes.

« Le niveau de gouvernance globale en Afrique maintient une tendance moyenne à l’amélioration au cours de la décennie écoulée, et environ trois citoyens du continent sur quatre (71,6 %) vivent en 2017 dans un pays où la gouvernance s’est améliorée », ont constaté les rédacteurs du 12e Indice Ibrahim de la gouvernance africaine. Mais en parallèle, la fondation rappelle que les attentes fortes d’une population de plus en plus jeune ne sont pas pour le moment satisfaites : le score moyen obtenu par le continent est 49,9 points sur 100.

Un score moyen qui est de surcroît tiré vers le haut par une quinzaine de « locomotives » réalisent les plus belles progressions depuis 2008 et plus particulièrement sur les cinq dernières années. Ces pays abritent, selon le rapport, presque la moitié de la population africaine, soit 48,7 %.

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Bons élèves

Dans son mot d’introduction, Mo Ibrahim a d’ailleurs exprimé sa satisfaction quant aux réalisations de la Côte-d’Ivoire qui signe la meilleure progression (12,7 points) entre 2007 et 2018, ce qui lui vaut de passer de la 41e à la 22e place. Le Maroc qui gagne 10 points et passe de la 25e à la 15e Kenya du classement, et le Kenya avec 8 points de plus (de la 19e à la 11e place) font aussi partie des bons élèves de l’indice.

En face, la Libye qui réalise la pire chute en perdant 15,6 points sur la même période, tandis que le Burundi perd 5 points et le Mali 4 points.

L’indice, élaboré à partir d’une centaine d’indicateurs répartis sur quatre grandes familles (sécurité et état de droit ; participation et droits de l’homme ; le développement économique durable ; développement humain) relève notamment la faible place du développement économique durable, qui ne progresse que de 0,2 % en dix ans, quand le PIB du continent bondit quant à lui de 40 %. Ce qui en dit long sur la capacité des gouvernements à offrir la possibilité aux potentiels investisseurs de poursuivre leurs objectifs économiques et de prospérer.

« En 2017, quatre des dix pays ayant le PIB le plus élevé du continent ont réalisé un score inférieur à la moyenne continentale en matière de Développement économique durable et se situent dans la moitié inférieure du classement africain. Il s’agit de l’Algérie, l’Angola, le Nigéria et le Soudan », pointe le rapport. Dans 25 pays, qui représentent 43,2 % de la population, le développement économique durable sur la décennie est même en régression.

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Un environnement des entreprises mal en point

Le Cap Vert et les Seychelles, qui sont respectivement les 6e et 5e plus petites économies d’Afrique, sont a contrario en haut de la liste en matière de Développement économique durable.

Pour la fondation, les performances réalisées en matière d’environnement des entreprises à l’échelle du continent reste très limitées. L’indicateur a connu une détérioration de presque 5 points au cours de la décennie écoulée. Une situation alarmante quand on sait que la population en âge de travailler devrait progresser de 30 % au cours des dix prochaines années. En parallèle, l’indicateur qui mesure la création d’emplois perd 3,1 points alors que celui de l’insertion socio-économique des jeunes recule de 2,3 points.

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La dimension Participation et droits humains a en moyenne progressé au cours de la décennie écoulée et presque 80% des citoyens du continent vivent dans un pays où la situation s’est améliorée dans ce domaine. Ceci dit, et de façon préoccupante, l’espace civique et politique enregistre en moyenne sur le continent un rétrécissement, avec une détérioration moyenne des indicateurs mesurant la participation de la société civile, les libertés d’association et de réunion, les droits et libertés individuels et la liberté d’expression.

  • Tunisie, 9e

La Tunisie signe la meilleure progression du continent dans le domaine de la participation et des droits de l’homme, un domaine dans lequel elle a gagné 22 places entre 2007 et 2018 pour se hisser en 9e position. Les progrès ont cependant commencé à ralentir en 2013, et même à décliner depuis 2016, notent les auteurs du rapport.

Le pays s’est aussi débarrassé d’une grande partie de ses lourdeurs bureaucratiques, une catégorie dans laquelle il progresse de 33,4 points en cinq ans.

  • Sénégal, 10e

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Les progrès enregistrés par le Sénégal relèvent majoritairement de la catégorie « développement humain ». L’Indice Mo Ibrahim relève notamment les avancées de Dakar en matière de lutte contre la pauvreté et de santé – le Sénégal aussi, avec le Burkina Faso, l’un des deux seuls pays dont les progrès dans le domaine de la santé ont été constants durant la dernière décennie.

Le pays de la Teranga fait aussi partie, avec l’Ouganda, le Zimbabwe, le Cap-Vert et le Tchad, des cinq pays qui ont le plus progressé en matière d’accès à l’électricité.

  • Maroc, 15e

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Deuxième en matière de management public, 3e pour les infrastructures et le secteur rural… S’il est un domaine dans lequel le Maroc s’illustre, c’est bien le développement économique durable, où le royaume se classe en 3e position, après une belle progression de 14,1 points. Le Maroc fait aussi partie des trois seuls pays (avec la Guinée et l’Égypte), où les banques se sont renforcées ces dix dernières années.

  • Côte d’Ivoire, 22e

Comme souligné ci-dessus, la Côte d’Ivoire signe la plus belle progression de l’indice, avec une amélioration de 12,7 points par rapport à 2008. Le pays est en outre le seul qui a progressé dans chacune des quatre catégories et des 14 sous-catégories de l’indice.

  • Algérie 27e

L’Algérie affiche un score légèrement moins important qu’il y a dix ans. Pourtant, l’analyse des auteurs de l’Index n’est pas si négative : dans certains domaines, notamment le droit de propriété, la situation, qui s’était fortement détériorée entre 2008 et 2013, se normalise depuis cette date. Si Alger poursuit sur sa lancée, elle devrait retrouver en 2019 sa situation de 2008.

Dans le domaine de la santé en revanche, les auteurs du rapport s’inquiètent d’une situation qui se dégrade.

  • Cameroun, 36e

Le rapport relève une situation qui a peu évolué dans le domaine des droits de l’homme ou de la croissance économique durable. En revanche, la situation sécuritaire s’est fortement détériorée, tandis que les secteurs de l’éducation et de la santé ont enregistré des progrès considérables.

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