Gambie : la libération de trois anciens « junglers » de Yahya Jammeh fait polémique

Trois anciens membres des escadrons de la mort de l’ex-président Yahya Jammeh ont été remis en liberté, lundi, sur décision du ministre gambien de la Justice, deux semaines après leurs aveux devant la Commission vérité et réconciliation (TRRC). Une décision décriée par les associations de victimes.

Yahya Jammeh encadré de sa garde rapprochée en 2016. © Rebecca Blackwell/AP/SIPA

Yahya Jammeh encadré de sa garde rapprochée en 2016. © Rebecca Blackwell/AP/SIPA

Publié le 6 août 2019 Lecture : 2 minutes.

Abubacarr Tambadou,  Malick Jatta, Omar Jallow et Amadou Bajie, trois « junglers » – anciens soldats qui étaient soumis aux ordres direct de l’ex-président Yahya Jammeh – vont être remis en liberté en Gambie.

La décision du ministre de la Justice, annoncée lundi, intervient deux semaines après le témoignage des trois hommes devant la Commission vérité et réconciliation (TRRC) lors de laquelle ils ont notamment reconnu avoir assassiné le journaliste Deyda Hydara, en 2004, et tué plus de 50 migrants ouest-africains échoués sur une plage, en 2005, ainsi que d’anciens compagnons de route de l’ancien président gambien, soupçonnés par celui-ci d’avoir voulu le renverser.

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« Éviter de décourager » les témoins ?

« Ce que nous devons absolument éviter, c’est de décourager les gens de venir dire la vérité devant cette commission chargée de faire la lumière sur les crimes commis pendant les 22 ans du régime de Yahya Jammeh », a justifié Abubacarr Tambadou, ministre de la Justice, précisant que cette remise en liberté ne constituait pas une amnistie.

Les trois hommes sont aux arrêts dans des casernes depuis leur interpellation en février-mars 2017, a souligné le ministre, expliquant qu’ils ne devaient pas être traités différemment d’autres criminels présumés laissés, eux, en liberté. Un ex-membre de la junte, Yankuba Touray, avait, pour sa part, été arrêté en juin après avoir refusé de répondre aux questions de la Commission.

S’ils fuient la Gambie, nous perdrons des témoins clés lors d’un éventuel futur procès de Yahya Jammeh

« Je ne me sens pas respectée par mon gouvernement, qui libère les hommes qui viennent de confesser avoir sauvagement tué mon fils », a déclaré Ya Mamie Cessay, la mère d’un des deux hommes d’affaires américano-gambiens tués et décapités en 2013. « C’est mal de remettre ces meurtriers en liberté après avoir entendu ces confessions », a abondé le fils du journaliste Deyda Hydara, Baba Hydara.

« S’ils fuient la Gambie, non seulement ils échapperont à la justice, mais nous perdrons également des témoins clés lors d’un éventuel futur procès de Yahya Jammeh pour avoir ordonné ces crimes horribles », a pour sa part mis en garde Reed Brody, conseiller juridique de Human Rights Watch. Le président Adama Barrow avait indiqué début 2018 qu’il attendrait la fin des travaux de la Commission – qui n’a pas le droit de prononcer des condamnations -, pour se prononcer sur une éventuelle demande d’extradition de son prédécesseur.

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Débutées en janvier, les auditions devant la TRRC, très suivies par les Gambiens, ont repris ce lundi avec l’audition d’un autre ancien « jungler », Ismaila Jammeh, qui a reconnu être impliqué dans la mort du lieutenant Almamo Manneh, ancien garde chargé de la protection du président Jammeh. « Quand il a appris qu’il était en état d’arrestation, le garde du corps a ouvert le feu en direction des soldats. On a tous tiré et il est mort », a expliqué Ismaila Jammeh, selon qui « la claire intention était de l’arrêter et non de le tuer ».

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