Nouveau gouvernement en Algérie : un tiers de ministres étaient en poste sous Bouteflika

Le nouveau président algérien Abdelmadjid Tebboune a nommé jeudi soir, deux semaines exactement après avoir pris ses fonctions, son premier gouvernement, composé de 39 membres. Onze des 28 ministres de la nouvelle équipe ont déjà été membres de l’exécutif sous Bouteflika.

Abdelmadjid Tebboune, le président algérien, le 19 décembre 2019. © Toufik Doudou/AP/SIPA

Abdelmadjid Tebboune, le président algérien, le 19 décembre 2019. © Toufik Doudou/AP/SIPA

Publié le 3 janvier 2020 Lecture : 3 minutes.

C’est une première, la composition du gouvernement étant généralement rendue publique par un communiqué officiel du porte-parole de la présidence qui en a donné la composition à la télévision nationale. Le 28 décembre, Abdelmadjid Tebboune avait nommé Premier ministre Abdelaziz Djerad, un universitaire de 65 ans, ancien secrétaire général de la présidence (1993-1995) puis du ministère des Affaires étrangères (2001-2003), et l’avait chargé de constituer un gouvernement.

Un tiers d’anciens ministres

Plus d’un tiers (onze) des 28 ministres de plein exercice nommés jeudi l’étaient déjà dans le gouvernement sortant ou dans une des équipes gouvernementales des 20 ans de présidence d’Abdelaziz Bouteflika, contraint à la démission le 2 avril sous la pression d’un mouvement (« Hirak ») de contestation inédit. On est donc loin du renouvellement exigé par ce « Hirak » qui réclame le démantèlement du « système » dirigeant l’Algérie depuis son indépendance en 1962.

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Le président Tebboune, 74 ans, fut longtemps lui-même ministre de Bouteflika, qui en fit son Premier ministre en mai 2017 avant de le limoger moins de trois mois plus tard. En prenant ses fonctions, il avait tendu la main au « Hirak », né le 22 février pour fonder une « nouvelle République ».

Sabri Boukadoum conserve ainsi le portefeuille des Affaires étrangères, dont il était déjà le titulaire dans le gouvernement de Noureddine Bedoui, nommé le 31 mars par le président Bouteflika, deux jours avant sa démission.

Kamel Beldjoud, le ministre de l’Habitat dans le gouvernement Bedoui, devient ministre de l’Intérieur, poste dont il assurait l’intérim depuis le limogeage le 19 décembre de son titulaire Salah Eddine Dahmoune, coupable d’avoir traité les manifestants du « Hirak » de « traîtres, mercenaires, homosexuels ».

Belkacem Zeghmati, déjà ministre de la Justice du gouvernement Bedoui, conserve lui aussi son portefeuille, de même que Mohamed Arkab à l’Énergie, Chérif Omari à l’Agriculture et Youcef Belmehdi aux Affaires religieuses.

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Tayeb Zitouni conserve quant à lui son portefeuille de ministre des Moudjahidines (anciens combattants) qu’il occupe sans interruption depuis 2017.

Abderrahmane Raouya redevient ministre des Finances, poste qu’il avait déjà occupé entre 2017 et fin mars 2019 sous la présidence Bouteflika, dans le gouvernement du Premier ministre Ahmed Ouyahia, sacrifié pour tenter – en vain – de calmer la contestation.

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Fidèle du président déchu, Ouyahia a été condamné en décembre à 15 ans d’emprisonnement pour des malversations, dans le cadre de vastes enquêtes sur des faits de corruption visant d’anciens hauts responsables et de puissants hommes d’affaires, proches de l’entourage de Bouteflika.

Pas de vice-ministre de la Défense

Au moins trois autres ministres – Farouk Chiali (Travaux publics), Sid Ahmed Ferroukhi (Pêche), Hassane Mermouri (Tourisme) – retrouvent des postes ministériels qu’ils ont également déjà occupés sous la présidence de Bouteflika.

Parmi les 28 autres ministres de plein exercice, plusieurs hauts fonctionnaires prennent la tête du ministère dans lequel ils officiaient. Et plusieurs portefeuilles sont attribuées à des personnalités de la société civile (universitaires, économistes, ingénieur, médecin…).

Principale fait notable, le gouvernement ne compte pas de vice-ministre de la Défense, poste qu’occupait depuis 2013 et jusqu’à son décès le 23 décembre, le puissant chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah. Le président de la République est traditionnellement ministre de la Défense en titre en Algérie.

Il n’a pas non plus de ministre de l’Économie, alors que l’Algérie souffre de sa dépendance au pétrole, dont la faiblesse durable des prix grève son budget et assèche ses réserves de change.

Seule concession apparente à la jeunesse – en pointe du « Hirak » dans un pays où plus de la moitié de la population a moins de 30 ans – , est créé un « ministère de la micro-entreprise, des start-up et de l’Économie de la connaissance » et deux ministères délégués, l’un chargé des incubateurs, l’autre des start-up.

Le gouvernement compte sept ministres délégués et quatre secrétaires d’Etat. Il comprend également cinq femmes, a dit à la presse le porte-parole de la présidence Belaïd Mohand Oussaïd. Le premier Conseil des ministres se réunira dimanche, a-t-il ajouté, cité par l’agence de presse APS.

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