Nigeria : Amnesty dénonce le meurtre d’indépendantistes pro-Biafra non armés

Amnesty International a dénoncé vendredi l’exécution le mois dernier, par les forces de l’ordre nigérianes, de militants indépendantistes non armés, avant et pendant une manifestation marquant l’anniversaire du début de la guerre civile du Biafra.

Manifestation en hommage à Chukwuemeka Ojukwu , chef de la guerre de sécession du Biafra, à Nnewi, dans le sud-ouest du Nigeria, le 29 février 2012. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Manifestation en hommage à Chukwuemeka Ojukwu , chef de la guerre de sécession du Biafra, à Nnewi, dans le sud-ouest du Nigeria, le 29 février 2012. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Publié le 10 juin 2016 Lecture : 3 minutes.

L’armée a rejeté vendredi ces accusations, affirmant de son côté que les indépendantistes pro-Biafra étaient armés et qu’ils ont perpétré des « destructions injustifiées » et « un nombre inimaginable d’atrocités » lors de cette manifestation.

Selon la police, 10 personnes ont été tuées – cinq dans la ville d’Onitsha, dans l’Etat d’Anambra, et cinq dans la ville d’Asaba, dans l’Etat voisin de Delta, dans le sud-est du Nigeria – au cours de violences liées à ces commémorations, lundi 30 mai.

la suite après cette publicité

Le mouvement Peuple indigène du Biafra (IPOB), un groupe indépendantiste à l’origine de ces commémorations, soutient de son côté qu’au moins 35 de ses membres ont été tués à Onitsha.

Au cours de visites dans des hôpitaux et des morgues, Amnesty a établi un bilan de 17 morts et 50 blessés à Onitsha, mais « le chiffre réel est sans doute plus important », prévient l’organisation de défense des droits de l’homme dans un communiqué.

Certains morts et des blessés ont reçu une balle dans le dos, ce qui indique qu’ils étaient en train de fuir au moment où ils ont été atteints, a souligné Amnesty.

« Ouvrir le feu sur des sympathisants de l’IPOB, qui ne représentaient une menace pour personne, démontre d’un usage scandaleux, excessif et inutile de la force », a dénoncé le directeur d’Amnesty pour le Nigeria, MK Ibrahim.

la suite après cette publicité

Une personne a même été tuée dans son sommeil, a-t-il dit.

L’IPOB a organisé de nombreuses manifestations à travers le sud-est du Nigeria depuis l’arrestation de son chef, Nnamdi Kanu, en octobre, pour « trahison ». Il est toujours en détention, dans l’attente d’un procès.

la suite après cette publicité

Lors des manifestations du 30 mai, les sympathisants de l’IPOB commémoraient le 49e anniversaire de la déclaration d’indépendance du Biafra, qui a conduit à cette guerre où près d’un million de personnes ont péri en trois ans.

Amnesty dit avoir parlé à 32 témoins oculaires à Onitsha. L’organisation ajoute n’avoir recueilli « aucune preuve » que les exécutions des forces de l’ordre ont été réalisées en état de légitime défense.

De son côté, le porte-parole de l’armée nigériane, le colonel Ha Gambo, affirme pourtant que deux policiers ont été tués à Onitsha, que plusieurs soldats ont été blessés par les manifestants, et qu’un véhicule de police a été brûlé, dans un commmuniqué transmis à l’AFP.

L’IPOB maintient, de son côté, que les manifestants n’étaient pas armés.

Un témoin affirme que l’armée a attaqué en utilisant des gaz lacrymogènes une église où les manifestants venus de loin s’étaient installés pour dormir, la nuit précédent la marche. Enfin, un homme affirme avoir vu un jeune garçon se faire tuer par balle alors qu’il avait les mains en l’air.

Le colonel Gambo accuse, lui, les manifestants d’avoir fait usage « d’armes à feu, ainsi que d’autres armes rudimentaires et des cocktails Molotov, à base d’acides et de dynamite ».

L’enquête d’Amnesty est une « campagne de calomnie » contre l’armée nigériane, selon M. Gambo.

Mais ce rapport fait écho aux accusations de l’IPOB contre les forces de l’ordre, lors de précédentes manifestations, entre novembre et février.

Des membres de l’IPOB ont affirmé à l’AFP le mois dernier que des manifestants avaient été tués et jetés dans des fosses communes, et que d’autres avaient disparu.

Les forces de l’ordre ont aussi été accusées d’avoir voulu dissimuler un charnier et d’avoir gardé des gens au secret dans la ville de Zaria, dans le nord, où la répression d’une manifestation de la communauté chiite aurait fait au moins 350 morts il y a quelques mois.

L’armée est souvent critiquée au Nigeria pour ses excès de violence, notamment dans le conflit contre les jihadistes de Boko Haram.

Selon M. Ibrahim, « ce n’est pas la première fois que des sympathisants de l’IPOB meurent entre les mains de l’armée ». « Il s’agit d’un schéma préoccupant et ces incidents ainsi que les autres doivent faire l’objet d’une enquête », a-t-il réclamé.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Contenus partenaires