Syrie: l’inquiétude s’empare des habitants de Damas face à la contestation

Damas a été jusqu’à présent peu touchée par la contestation contre le régime syrien mais ses habitants sont de plus en plus inquiets et craignent de voir la crise s’installer dans la durée avec encore plus de morts.

Syrie: l’inquiétude s’empare des habitants de Damas face à la contestation © AFP

Syrie: l’inquiétude s’empare des habitants de Damas face à la contestation © AFP

Publié le 24 mai 2011 Lecture : 3 minutes.

La capitale syrienne montre encore ses habituels embouteillages et trottoirs encombrés mais nombre d’évènements culturels sont annulés ou avancés pour que les habitants n’aient pas à s’attarder.

« Il y a deux semaines nous croyions toujours aux assurances du gouvernement que la situation était sous contrôle et que la crise était terminée », confie une habitante qui s’avoue plutôt proche du régime.

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« Mais l’avenir est soudain beaucoup plus sombre et je me demande où nous emmène le gouvernement », ajoute-t-elle, en s’exprimant sous le couvert de l’anonymat comme beaucoup de Syriens inquiets de la répression.

Damas, une ville de quatre millions d’habitants, est considérée comme offrant une base solide au régime alaouite du président Bachar al-Assad et abrite une forte minorité chrétienne ainsi qu’une classe moyenne sunnite aisée. « Les gens commencent à réaliser que cela va durer et que le pays traverse des changements profonds », ajoute un homme d’affaire.

Selon les organisations de défense des droits de l’Homme, quelque 900 personnes ont été tuées et des milliers arrêtées depuis les premières manifestations à la mi-mars.

L’élément déclencheur a été l’arrestation dans la ville de Deraa (sud) d’adolescents qui avaient écrit sur les murs des slogans anti-régime. « Je pense que le jour où ces jeunes gens ont été arrêtés et torturés à Deraa a fait basculer les choses car les gens dans le sud étaient en colère face à la corruption », estime un autre habitant de la capitale. « Le couvercle a sauté ».

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Le propriétaire d’un hôtel souligne que la saison touristique est maintenant perdue. « Les gens réalisent que cela pourrait encore durer des mois et se tournent vers le gouvernement en attendant des réponses mais rien ne vient ». « Nous avons considérablement réduit nos tarifs et licencié des employés mais certains d’entre-nous ont du fermer pour réduire leurs pertes », souligne-t-il.

Après plusieurs semaines d’hésitation, les Etats-Unis et l’Union européenne ont imposé des sanctions contre le président Assad et ses principaux collaborateurs, isolant encore davantage le pays.

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Face à la contestation, le régime a offert quelques concessions mais s’est surtout lancé dans une forte répression, tout en dénonçant les sanctions internationales comme une ingérence dans ses affaires intérieures. « C’est comme une tache d’huile qui s’agrandit. Je pense qu’il va y avoir encore beaucoup de morts et que le régime pourrait s’effondrer », juge un commerçant.

Un homme d’affaires souligne le rôle de l’internet et des réseaux sociaux dans la contestation.

« Quand le père d’Assad, Hafez, a écrasé la rébellion à Hama en 1982 en tuant des milliers de gens, ce massacre n’a pratiquement pas fait de bruit en dehors de la Syrie », rappelle-t-il. « Mais cette fois-ci, ils n’arrivent pas à étouffer » la contestation.

La peur, qui dissuadait auparavant beaucoup de Syriens de manifester, n’est également plus un rempart pour le régime. « La plupart des révolutions dans le monde se sont produites quand le mur de la peur est tombé, et c’est ce qui arrive en Syrie », affirme une habitante de la capitale.

D’autres Syriens pensent toutefois que Bachar al-Assad souhaite sincèrement des réformes et qu’il faut lui donner le temps de les appliquer. Ils font porter la responsabilité des affrontements à des agents de l’étranger venus notamment d’Arabie saoudite et du Liban voisin.

« Tout le monde est d’accord pour dénoncer la corruption mais on ne peut s’en débarrasser du jour au lendemain », dit un Syrien, en avertissant que « si on arrache cet arbre pourri trop vite, on risque de détruire la moitié du pays en même temps ».

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