Au Tchad, mauvaise récolte, pauvreté et malnutrition, lot quotidien du Kanem

Yeux exorbités et visage émacié, Idriss Mahamat, un an, présente tous les symptômes de la malnutrition aiguë sévère: sa mère a fait 7 km à pied pour venir au centre de santé de Mechimere, dans l’ouest du Tchad, touché par la sécheresse et une récolte désastreuse.

Publié le 13 décembre 2009 Lecture : 2 minutes.

Idriss Mahamat pèse 6,1 kg alors qu’il devrait en peser environ 10, son périmètre brachial est de 111 mm pour une taille de 60,5 cm.

« Tous ses chiffres sont très en dessous de ce qu’ils devraient être. Dans le secteur de Mechimere qui compte 7. 612 habitants, j’ai actuellement 2 à 4 enfants en situation grave comme celui-ci et plus de cent en situation de malnutrition modérée », affirme Yohossoum Beyoum, responsable du centre.

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Depuis le début de l’année, le Programme alimentaire mondial a distribué plus de 120 tonnes de nourriture de base dans le Kanem et le Bahr-al-Ghazal où la « situation alimentaire est catastrophique », selon Souleyman Mahonte, nutritionniste du PAM. Le PAM, l’Unicef et les autorités ont mis en place un plan pour éviter le pire.

« Il faut agir vite. Il faut prévenir une crise », dans une région où la malnutrition était déjà chronique, affirme le représentant de l’Unicef au Tchad, Marzio Babille.

Selon l’Unicef, quelque 2. 200 enfants de ces deux régions d’une population d’un peu moins de 500. 000 habitants sont en situation de malnutrition « sévère » et un peu plus de 13. 000 sont dans une situation de malnutrition « modérée ».

Les précipitations ont été divisées par dix en un an dans la zone. La sécheresse, qui pourrait en partie être due au réchauffement planétaire, a touché tout le pays et la production agricole a été réduite d’un tiers sur l’ensemble du Tchad mais dans le Kanem, la baisse est encore plus dramatique.

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« Cette année, nous n’avons récolté que 10 koros (tasses) de mil », explique Zara Adoum, la mère d’Idriss Mahamat. « D’habitude nous récoltons 3 sacs », soit environ quinze fois plus. « Tant de travail pour si peu », soupire-t-elle.

Comme dans beaucoup de foyers, le père de famille a alors quitté la maison pour tenter sa chance à N’Djamena ou près du lac Tchad. Le mari de Zara est actuellement dans la capitale tchadienne d’où il envoie quand il peut, par le biais de caravanes ou d’amis, des produits de base et parfois de l’argent. Il revient tous les deux mois environ.

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Entre les envois, Zara, mère de 7 autres enfants, survit comme elle peut en tressant notamment des paniers vendus au marché pour 1000-2000 F CFA (1,5-3 euros) alors que les prix ont explosé, le koro de mil étant passé en un an de 200-300 F CFA à 750 F CFA.

« La situation est aggravée par le départ de l’homme », explique M. Mahonte. « La femme, qui est souvent elle aussi sous-alimentée, doit se débrouiller avec les enfants. Beaucoup ne vont pas au centre de santé, car elles n’ont pas le temps de marcher des kilomètres pour une simple piqûre pour un seul enfant d’une famille nombreuse. Le résultat, c’est que l’enfant va peut être mourir ».

« La situation est encore aggravée par le fait qu’il n’y aucune autre activité économique dans la région et que s’y déplacer est très difficile », analyse M. Mahonte.

La sécheresse a tué des milliers de têtes de bétail. Autour des villages, des squelettes blanchis par le soleil, après avoir été dépouillés de toute viande par des dizaines de charognards, sont légion.

« Il n’y a plus d’herbe », explique Bertrand Saleh, un notable de Mechimere. « La situation est très mauvaise. Si les autorités ne nous aident pas, il nous faudra partir, prévient-il. « Pour le moment, nous attendons mais nos affaires sont prêtes ».

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