De Tunis à Casa, les rois du fast-food se relancent

Après deux échecs, Quick repart à l’assaut du Maghreb en ouvrant des points de vente en Tunisie et au Maroc. Mais le français fait face, comme McDonald’s et Burger King, à un gros point de blocage : l’Algérie.

Le premier Quick tunisien : un modeste comptoir dans un Carrefour Market de la banlieue de Tunis. © ONS ABID POUR J.A.

Le premier Quick tunisien : un modeste comptoir dans un Carrefour Market de la banlieue de Tunis. © ONS ABID POUR J.A.

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© Vincent Fournier pour JA

Publié le 26 juin 2015 Lecture : 5 minutes.

Les Tunisiens en rêvaient, Quick l’a fait. Après diverses tentatives depuis le début des années 2000, l’enseigne française de restauration rapide est enfin venue à bout des différentes difficultés administratives qu’elle rencontrait. En avril, le groupe a ouvert dans le pays le premier point de vente d’un label international de fast-food. Deux mois plus tard, sa direction se dit très satisfaite des résultats, qui ont dépassé son « hypothèse haute ». Confronté à une rude concurrence en Europe, son principal marché, le groupe détenu par Qualium Investissement, une filiale de la Caisse des dépôts et consignations française, a lancé un ambitieux plan d’expansion en Asie, au Moyen-Orient et, bien évidemment, en Afrique.

Sur le continent, Quick – qui d’après la presse française pourrait être racheté par des investisseurs américains – a décidé de mettre d’abord le cap sur le Maroc et la Tunisie. Dans le royaume, l’ouverture de deux restaurants, à Casablanca et à Rabat, est prévue dans les six prochains mois. Deux autres points de vente doivent compléter le réseau d’ici à la fin de l’année à Tunis. « La Tunisie et le Maroc sont deux économies dynamiques avec une population jeune importante ayant des liens très forts avec l’Europe. C’est un élément intéressant pour l’installation de marques internationales de restauration rapide », remarque un spécialiste du secteur.

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Partenaires locaux

Après les échecs essuyés au Maroc en 2003 et en Algérie en 2007, cette nouvelle offensive de Quick sera-t-elle plus fructueuse ? Le groupe, qui a vu son chiffre d’affaires reculer de 4 % en 2014 pour s’établir à 1,029 milliard d’euros, semble se donner cette fois davantage de moyens pour atteindre son objectif. En septembre 2014, il a confié son développement à l’international au Français Thierry Rousset, débauché chez le concurrent américain Burger King, où il était chargé de la zone Turquie, Europe du Sud et Afrique.

Doté d’une solide expérience dans la restauration rapide et dans la franchise, ce diplômé de l’université Lyon-III a débuté sa carrière chez McDonald’s et a travaillé chez Subway. Sa stratégie ? « Un développement exclusif en masters-franchises, explique-t-il. S’implanter en dehors de ses territoires nécessite une parfaite compréhension des marchés, que ce soit en termes de produits, de comportements ou de sourcing. En s’alliant avec des partenaires locaux bénéficiant de cette connaissance et de solides capacités financières, Quick s’assure de la pertinence et de l’adéquation de sa stratégie de développement avec chaque marché. »

Quick a décidé de s’allier avec des partenaires locaux bénéficiant de la connaissance du marché local et de solides capacités financières.

En Tunisie, où le coût de la franchise est estimé à plus de 400 000 euros – auxquels il faut ajouter 2 % à 5 % de royalties par an -, c’est au conglomérat familial Hachicha, actif dans l’agroalimentaire, la chimie et l’électroménager, que Quick s’est associé. Le groupe tunisien développera la marque française en exclusivité sur tout le territoire. Et pour s’adapter à la clientèle locale, « l’intégralité des viandes servies est certifiée halal », assure-t-on au sein du groupe français, tout en précisant que, à l’exception de quelques burgers (qui arriveront plus tard), l’offre est identique à celle disponible en France.

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À terme, Quick mettra en place un circuit d’approvisionnement local. « Cela sera possible dès que nous aurons homologué nos fournisseurs tunisiens, qui seront tenus de se conformer à nos cahiers des charges. Ce processus réclame un peu de temps, car ceux-ci sont exigeants. C’est indispensable si nous voulons garantir à nos consommateurs tunisiens le même goût et la même qualité. La démarche est similaire au Maroc », affirme Thierry Rousset. Mais pour l’instant, la viande de bœuf est importée de France, tout comme le poisson et le poulet.

Bataille

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En Tunisie, Quick arrive sur un marché en pleine construction et prend de court ses concurrents américains McDonald’s et Burger King, souvent annoncés mais encore absents. Le premier avait pourtant signé dès 1996 avec le groupe Bouchamaoui un contrat de développement qui serait toujours valable. Quant au second, il prépare, d’après nos informations, l’ouverture prochaine de son premier restaurant dans le pays. Son partenaire local est Omar Jenayah, le fils du tycoon du tourisme Othman Jenayah. Début 2015, l’homme d’affaires tunisien a créé une coentreprise dénommée First Food Services Tunisia (FFST) avec le holding familial saoudien Olayan, qui détient la franchise Burger King pour le Moyen-Orient et le Maroc.

Burger King prépare, Omar Jenayah, l’ouverture prochaine de son premier restaurant en Tunisie

Au contraire de l’Algérie, où aucune de ces majors n’est implantée, le royaume chérifien verra débarquer le groupe français alors que la bataille fait rage entre les deux américains. Présent dans le pays depuis 1992, McDonald’s, leader incontesté du marché, fait désormais face à la concurrence féroce de son challenger, Burger King. Arrivée au Maroc en décembre 2011, la chaîne s’est vite développée et compte désormais sept restaurants à travers le pays.

Portée par une coentreprise entre Hana International (filiale d’Olayan) et le marocain Best Financière, elle veut mettre les bouchées doubles pour ouvrir d’ici à 2018 quinze nouveaux points de vente.

Un plan de développement ambitieux qui nécessitera des investissements de l’ordre de 25 millions d’euros, selon le management. L’enseigne devrait d’ailleurs bénéficier des synergies avec Best Financière, groupe présidé par Zouhair Bennani (par ailleurs propriétaire des enseignes de grande distribution Label’Vie et Carrefour Market), mais aussi et surtout de la chaîne de centres commerciaux Almazar, promue et développée par sa filiale Best Real Estate.

Face à cette offensive du « King », la réaction du leader historique ne s’est pas fait attendre. Disposant de 35 restaurants dans 14 villes du pays, l’enseigne portée par First Rest International, de Nacer Alami, a sorti l’artillerie lourde. « Nous comptons investir 250 millions de dirhams [22,7 millions d’euros] d’ici à 2018 pour disposer d’un réseau de 50 restaurants, tout en diversifiant notre offre avec un nouveau concept : le McCafé », signale la firme.

Un objectif tout à fait accessible. Depuis 2013, la marque au célèbre clown ouvre trois à quatre nouveaux points de vente par an. Un rythme qui devrait être maintenu en 2015, l’enseigne prévoyant de finir l’année avec 39 restaurants.

De son côté, après son expérience peu concluante en 2003, Quick a choisi pour son come-back de s’associer à un opérateur de poids. Il s’agit de Ténor Group, de Farid Bensaïd, un holding multimétier actif dans les nouvelles technologies, l’immobilier, l’assurance, l’enseignement…

Avant même son démarrage effectif, ce partenariat, en relançant la concurrence, donne déjà des sueurs froides aux américains. Pour le plus grand bonheur du consommateur marocain, grand amateur de burgers.

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