Maroc : les technologies pour grossir les listes électorales

Le royaume du Maroc compte entre 4 et 5 millions d’irréductibles abstentionnistes. Comment les convaincre de s’inscrire ? Internet est une des pistes envisagées.

fahhd iraqi

Publié le 15 mars 2018 Lecture : 3 minutes.

Un bureau de vote pour les élections législatives du Mali à Gao, le 24 novembre 2013. (photo d’illustration) © Jerome Delay/AP/SIPA
Issu du dossier

Élections : l’Afrique progresse-t-elle ?

Rien n’est encore parfait au sein de la plupart de processus électoraux africains. Mais caricaturer les élections africaines comme des élections fantoches serait aujourd’hui d’un autre âge. Car ces dernières progressent, gagnent en crédibilité et en indépendance.

Sommaire

Plus de 21 millions de Marocains sont en âge de voter. Mais seuls 15,6 millions d’entre eux sont inscrits sur les listes électorales. Faites le compte : 4,5 millions de personnes ont, dans ce pays, renoncé à exercer leur droit de vote et n’apparaissent dans aucune statistique, le taux de participation à un scrutin étant établi à partir du nombre des inscrits. Le paradoxe est que l’ensemble des forces politiques, encore traumatisées par le taux de participation catastrophique – moins de 37 % – aux élections de 2007, semblent s’accommoder de cette anomalie.

Les autorités ne ménagent pourtant pas leurs efforts pour actualiser les listes et inciter les citoyens à s’y inscrire. En février, des commissions administratives présidées par des magistrats ont multiplié les réunions dans les communes et les arrondissements pour procéder à des mises à jour tenant compte des demandes d’inscription reçues en janvier.

la suite après cette publicité

Dérives

Afin de faciliter cet enrôlement, les citoyens ne sont, depuis 2015, plus tenus de se rendre dans le bureau administratif le plus proche de leur domicile et peuvent s’inscrire sur internet (listeselectorales.ma). Cette innovation a aussitôt été plébiscitée : les deux tiers des 1,4 million de nouveaux électeurs y ont eu recours.

Le parti a alors proposé de rendre l’inscription sur le registre électoral automatique pour tout détenteur d’une carte d’identité nationale

C’était hélas trop beau pour être tout à fait vrai. Dès 2016, le ministère de l’Intérieur a été contraint de resserrer la procédure et de rendre l’inscription électronique strictement personnelle par le biais d’un contrôle des courriels et, éventuellement, des adresses IP. Le Parti de la justice et du développement (PJD) avait en effet mis en place des cellules chargées d’inscrire ses sympathisants islamistes par fournées entières. C’est ainsi que des centaines de milliers de nouveaux inscrits l’ont été à partir de quelques adresses électroniques, présumées liées au parti !

À la veille des législatives de 2016, un bras de fer s’est ensuivi entre la première force politique du pays et le ministère de l’Intérieur. Ce dernier s’est finalement résolu à radier une bonne partie des électeurs collectivement inscrits par le PJD.

Maroc cherche électeurs

Toujours dans l’objectif d’augmenter le nombre des inscrits, ce même parti a alors proposé, de concert avec d’autres, de rendre l’inscription sur le registre électoral automatique pour tout détenteur d’une carte d’identité nationale. L’opération aurait été facilitée par l’introduction (en 2008) de la pièce d’identité biométrique…

la suite après cette publicité

Le ministère de l’Intérieur s’y est opposé en invoquant des contraintes techniques. Et la majorité de la classe politique s’est laissé convaincre. Nombre de responsables restent en effet attachés à la dissociation entre registre d’état civil et liste électorale… Une avancée, cependant : en 2015, la carte d’électeur a été supprimée. Pour être autorisé à glisser son bulletin dans l’urne, il suffit désormais de présenter sa carte d’identité.

Bureaux de vote géolocalisés

Parallèlement à la suppression de la carte d’électeur, le ministère de l’Intérieur s’efforce de simplifier la vie des votants. Il suffit de composer un numéro de téléphone gratuit, le 2727, et de communiquer le numéro de sa carte d’identité pour recevoir l’adresse de son bureau de vote. Une autre application, MonBV, a été mise en service ; elle fait apparaître ledit bureau sur une carte. C’est d’autant plus pratique que le taux de pénétration de la téléphonie mobile est aujourd’hui de l’ordre de 126 %.

la suite après cette publicité

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image