Islam politique : Ennahdha, consensuelle par nécessité

Si Ennahdha a décidé en 2016 de séparer son action politique de la prédication, les références religieuses essentielles n’ont pas changé. Minoritaire mais incontournable à l’Assemblée nationale, elle adopte un positionnement centriste et pratique le consensus.

Des militants du parti islamiste tunisien Ennahdha prient pour soutenir le gouvernement, le 7 septembre 2012 à Tunis (image d’illustration). © Hassene Dridi/AP/SIPA

Des militants du parti islamiste tunisien Ennahdha prient pour soutenir le gouvernement, le 7 septembre 2012 à Tunis (image d’illustration). © Hassene Dridi/AP/SIPA

Publié le 30 janvier 2019 Lecture : 2 minutes.

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Maghreb : quel avenir pour les partis islamistes ?

Depuis une décennie, ces formations issues de l’opposition radicale se fondent tant bien que mal dans le paysage politique, au point d’occuper souvent des responsabilités gouvernementales. Comment ont-elles résisté à l’épreuve du pouvoir ? Sont-elles vouées à l’exercer longtemps encore ? Enquête.

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Sortie de vingt ans de clandestinité à la faveur de la révolution de 2011, Ennahdha s’est vite installée dans le paysage politique tunisien. C’est grâce – ou à cause – d’elle que l’islam est désormais au cœur des débats. Le « parti d’Allah », comme certains le surnomment, a remporté les législatives de 2011 en recueillant 1,5 million de suffrages, mais a échoué à imposer la charia comme base de la Constitution de 2014.

Huit ans plus tard, il a perdu un million de voix aux municipales. Les électeurs lui ont fait payer sa mauvaise gestion lors de son passage aux affaires (2012-2013), la montée de l’extrémisme religieux pendant cette même période et sa volonté d’imposer un islam plus strict et orthodoxe à une société déjà très conservatrice.

Parler d’islam politique confère à la chose un caractère sacré, alors qu’il ne s’agit que d’une utilisation de la religion par le politique

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« Politique islamiste » contre « islam politique »

Ennahdha, qui aujourd’hui se compare volontiers à la démocratie chrétienne italienne ou allemande, a tiré les leçons de ce désaveu lors de son 10e Congrès, en 2016, en décidant de séparer son action politique de la prédication, désormais du ressort de la société civile. Mais cet aggiornamento n’a été que de façade : la terminologie a changé, pas les références religieuses essentielles. Les mouvements islamistes ayant récemment subi une série de revers sur la scène internationale, Ennahdha ne parle plus d’islam politique.

« Le terme de politique islamiste serait plus adéquat, analyse le psychiatre Taïeb Ghodbane. Parler d’islam politique confère à la chose un caractère sacré, alors qu’il ne s’agit que d’une utilisation de la religion par le politique. »

Minée par les divisions

Sur le plan politique, justement, Ennahdha, qui dispose de 68 sièges à l’Assemblée nationale, participe au pouvoir sans en endosser les responsabilités. Minoritaire mais incontournable, elle adopte un positionnement centriste et pratique le consensus, non sans susciter des dissensions au sein des formations avec lesquelles elle est amenée à s’allier : Nidaa Tounes, le Congrès pour la République, Ettakatol…

Très disciplinée en apparence, elle est en réalité minée par les divisions. Ce n’est un secret pour personne, par exemple, que la jeune garde aimerait bien prendre la relève des pères fondateurs lors des prochaines élections, dans le courant de cette année.

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